1) La sainteté de Marie suscite notre vénération et notre imitation..
2) La maternité de Marie et sa foi suscite notre reconnaissance.
3) L’intercession constante de Marie suscite notre prière confiante.
4) Jean 19,25-27 suscite l’accueil du don de Jésus « voici ta mère ».
5) Prier Marie Mère des disciples (Jn 19,25-27) et Mère des vivants.
L’ange l’a saluée comme pleine de grâce (Lc 1,28), son Oui à l’Annonciation est libre mais il est un "oui" préparé, elle est pleine de grâce.
Marie est sainte parce que la maternité divine l’a formellement sanctifiée. La Mère de Dieu devient la toute sainte. Marie est sainte parce que l’Esprit Saint qui est l’esprit de Sainteté a pris sa demeure en elle, il en a fait son temple, il l’a consacrée à Dieu et il a rendu son cœur nouveau et docile, orné de l’abondance de ses dons.
Marie est sainte parce qu’elle est la première et la plus parfaite des disciples du Christ (Marialis Cultus 35), elle a vécu la foi, l’espérance et la charité de manière héroïque. Elle n’a pas vécu pour elle-même, elle donne son fils, le Christ, et le suit jusqu’à la croix. Elle croit à la mission de Jésus, elle croit qu’il donne la vie.
Marie est sainte parce que le péché ne l’a jamais effleuré, l’église en a eu conscience depuis les premiers temps et l’a exprimé dans la liturgie, mais il y avait parfois, parmi les pères de l’église et parmi les saints, quelques hésitations, particulièrement parce qu’on voulait dire que Marie avait aussi bénéficié de la Rédemption en Jésus. Le sensum fideli général est cependant l’absence de péché en Marie, c’est ce que croit l’Eglise et cela fut réaffirmé:
- au concile de Trente en 1547, canon 23,
- dans le dogme de la Conception immaculée, en 1854,
- et dans la constitution dogmatique du Vatican II, Lumen Gentium, n°56
En conséquence :
La sainteté devient une règle de vie, un exemple pour tous.
La sainteté de Marie est aussi une maternité, comme nous disons de tel ou tel saint, par exemple saint François d’Assise, que nous sommes ses fils.
Tous les chrétiens trouvent une inspiration spéciale en Marie pour suivre le Christ.
Quand l’Eglise grandit dans la communion des saints, alors on découvre davantage Marie.
C’est pourquoi, une bonne piété mariale célèbre ensemble les saints, la Vierge Marie et le Christ dans la cohérence de la foi.
La maternité divine constitue le motif principal du culte envers Marie.
1) Le caractère tout à fait unique de la maternité de Marie suscite notre vénération,
Cela apparaît dans l’attitude d’Elisabeth et de Jean Baptise à la Visitation (Luc 1,39-45) :
-La simple salutation de Marie révèle l’événement opéré en elle ;
-Jean Baptiste tressaille parce qu’il est rempli de l’Esprit Saint ;
-L’Esprit Saint introduit Elisabeth dans le mystère de la maternité de Marie
-Elisabeth reconnaît Marie comme la Mère du Seigneur
Or, la Visitation (où les verbes sont au présent ou au passé) est le prolongement de l’Annonciation, (où les verbes sont surtout au futur).
-C’est une maternité virginale. Marie est vierge (Lc 2,27) et dit « je ne connais pas d’homme » (Lc 2,34).
-C’est une maternité royale : ce fils est de la descendance de David et son règne n’aura pas de fin. Il accomplit les promesses de Nathan (2 Sam 7) et la prophétie d’Is 7,14, qui ont en commun l’initiative unilatérale de Dieu et sa fidélité. Mère du messie davidique, Marie est la « gebirah », la reine mère à qui s’adresse l’hommage et la vénération de tout le peuple messianique. Le prince qui naîtra d’elle n’est pas seulement fils de David, mais Fils de Dieu (on observe la progression entre le v 32 et le v 35).
-C’est une maternité par l’opération du Saint Esprit, qui de sa puissance divine prend sous son ombre la Vierge Marie, comme la nuée couvrait l’arche de l’alliance et rendait présent le Seigneur.
Une telle maternité virginale, royale, divine, œuvre de l’Esprit Saint, est objet d’une vénération pleine de stupeur de la part d’Elisabeth et de l’Eglise de saint Luc.
2) Le second motif de la vénération de Marie, c’est sa foi : « Bienheureuse celle qui a cru ! » (Lc 1, 45)
La maternité et la foi sont intimement liées : on ne peut pas les séparer. La foi est au service de la maternité et la maternité divine ne s’explique pas sans elle. Il s’agit d’une adhésion à la Parole à la manière d’Abraham, qui a cru contre toute évidence et fut béni par le don d’un fils. La foi est l’attitude caractéristique de Marie : son existence est sous le signe de son Fiat initial – véritable option fondamentale – qui illumine tout le reste. En est la preuve aussi l’éloge de la femme de la foule (Lc 11, 27) que Jésus rectifie, la béatitude est celle de ceux qui écoutent la parole et qui la gardent. Le même enseignement émerge de la péricope de la mère et des frères cherchant Jésus (cf. Lc 8,21)
« A partir du consentement qu’elle apporta par sa foi au jour de l’Annonciation et qu’elle maintint dans sa fermeté sous la croix, cette maternité de Marie dans l’économie de la grâce se continue sans interruption jusqu’à la consommation définitive de tous les élus. » (LG 62)
L’intercession de Marie a une phase terrestre, lors de son « Oui » à l’Annonciation, lors de sa demande à Cana, puis à la croix, au cénacle et à la Pentecôte. Son intercession continue ensuite, jusqu’aujourd’hui : « En effet, après son Assomption au ciel, son rôle dans le salut ne s’interrompt pas: par son intercession répétée elle continue à nous obtenir les dons qui assurent notre salut éternel. Son amour maternel la rend attentive aux frères de son Fils dont le pèlerinage n’est pas achevé, ou qui se trouvent engagés dans les périls et les épreuves, jusqu’à ce qu’ils parviennent à la patrie bienheureuse. » (LG 62)
L’intercession de Marie continue donc au ciel. Cette affirmation, qui n’est pas directement présente dans l’Ecriture, recueille l’expérience de l’Eglise guidée par l’Esprit Saint. L’intercession du Christ a une valeur infinie, elle concerne le salut éternel. Marie, qui lui fut associée sans cesse sur la terre, continue à lui être associée pour que personne n’aille à la perdition, c’est une mission de salut : elle intercède pour les besoins quotidiens mais avant tout pour notre salut éternel.
« C’est pourquoi la bienheureuse Vierge est invoquée dans l’Eglise sous les titres d’avocate, d’auxiliatrice, de secourable, de médiatrice, tout cela cependant entendu de telle sorte que nulle dérogation, nulle addition n’en résulte quant à la dignité et à l’efficacité de l’unique Médiateur, le Christ. » (LG 62)
L’intercession de Marie est subordonnée à l’unique médiation du Christ, elle ne lui enlève rien, ni ne lui ajoute rien. Personne n’est plus proche de nous que le Christ.
Nous invoquons Marie non pas par crainte du Christ mais par ce que nous sommes des disciples du Christ qui accueillent son testament « voici ta mère ». Marie intercède pour tous, y compris pour les infidèles, les incroyants, parce que l’œuvre de la Rédemption concerne tous les hommes.[1]
La distance entre Dieu et Marie (une créature) est une distance immense, mais Dieu la comble et suscite la coopération de Marie :
« Aucune créature en effet ne peut jamais être mise sur le même pied que le Verbe incarné et rédempteur. Mais tout comme le sacerdoce du Christ est participé sous des formes diverses, tant par les ministres que par le peuple fidèle, et tout comme l’unique bonté de Dieu se répand réellement sous des formes diverses dans les créatures, ainsi l’unique médiation du Rédempteur n’exclut pas, mais suscite au contraire une coopération variée de la part des créatures, en dépendance de l’unique source. Ce rôle subordonné de Marie, l’Eglise le professe sans hésitation ; elle ne cesse d’en faire l’expérience ; elle le recommande au cœur des fidèles pour que cet appui et ce secours maternels les aident à s’attacher plus intimement au Médiateur et Sauveur. » (LG 62)
Tout cela est exprimé dans l’un des formulaires du missel.[2]
Jésus dans son amour a fait don de sa mère au disciple, à l’Eglise et à l’humanité.
La présence de Marie dans l’Eglise est l’accueil du don que Jésus a fait sur la croix.
Et Marie accomplit l’ultime volonté de Jésus, dans cohérence avec le Fiat de l’Annonciation, elle dit oui à la parole de Jésus « voici ton fils » (Jn 19,25-27), et accomplit la tâche maternelle de s’occuper des disciples, et pour accomplir cette tâche, elle reçoit la grâce nécessaire.
Le pape Paul VI a expliqué que Marie est un don de Jésus au disciple. Le culte marial a sa raison ultime dans la volonté insondable de Dieu, dans son dessein d’amour. Dieu a aimé Marie pour soi-même et l’a aimé aussi pour nous. Il se l’est donné à lui-même et il nous l’a donné. Le don de Marie appartient au testament de Jésus et se rattache au mystère pascal. (Marialis Cultus 56)
Le pape Jean Paul II, dans l'encyclique Redemptoris Mater dit :
« 23. Le récit de Jean est concis: «Près de la Croix de Jésus se tenaient sa mère et la sœur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie de Magdala. Jésus donc, voyant sa mère et, se tenant près d’elle, le disciple qu’il aimait, dit à sa mère: «Femme, voici ton fils». Puis il dit au disciple: «Voici ta mère». Dès cette heure-là, le disciple l’accueillit chez lui» (Jn 19, 25-27). (…) On peut dire que, si la maternité de Marie envers les hommes avait déjà été antérieurement annoncée, elle est maintenant clairement précisée et établie: elle résulte de l’accomplissement plénier du mystère pascal du Rédempteur. La Mère du Christ, se trouvant directement dans le rayonnement de ce mystère où sont impliqués les hommes -tous et chacun-, est donnée aux hommes -à tous et à chacun- comme mère. L’homme présent au pied de la Croix est Jean, «le disciple qu’il aimait». Et pourtant, il ne s’agit pas que de lui seul. Selon la Tradition, le Concile n’hésite pas à appeler Marie «Mère du Christ et Mère des hommes»: en effet, elle est, «comme descendante d’Adam, réunie à l’ensemble de l’humanité..., bien mieux, elle est vraiment "Mère des membres [du Christ]... ayant coopéré par sa charité à la naissance dans l’Eglise des fidèles" ». (Pape Jean Paul II, lettre encyclique Redemptoris Mater, 23)
« On peut dire qu’il y a analogie entre la maternité «dans l’ordre de la grâce» et ce qui, «dans l’ordre de la nature», caractérise l’union entre la mère et son enfant. Sous cet éclairage, on peut mieux comprendre le fait que, dans son testament sur le Golgotha, le Christ a exprimé au singulier la nouvelle maternité de sa Mère, en se référant à un seul homme: «Voici ton fils».
En outre, dans ces mêmes paroles est pleinement indiqué le motif de la dimension mariale de la vie des disciples du Christ: non seulement de Jean, qui se trouvait à cette heure sous la Croix avec la Mère de son Maître, mais de tout disciple du Christ, de tout chrétien. Le Rédempteur confie sa Mère au disciple, et en même temps il la lui donne comme mère. La maternité de Marie, qui devient un héritage de l’homme, est un don, un don que le Christ lui-même fait personnellement à chaque homme. Le Rédempteur confie Marie à Jean du fait qu’il confie Jean à Marie. Au pied de la Croix commence cette particulière offrande de soi de la part de l’homme à la Mère du Christ qui fut ensuite pratiquée et exprimée de diverses manières dans l’histoire de l’Eglise. Quand le même Apôtre et évangéliste, après avoir rapporté les paroles adressées par Jésus sur la Croix à sa Mère et à lui-même, ajoute: «Dès cette heure-là, le disciple l’accueillit chez lui» (Jn 19, 27), cette affirmation veut dire, bien sûr, qu’au disciple fut attribué un rôle de fils et qu’il assuma la charge de la Mère de son Maître bien-aimé. Et parce que Marie lui fut donnée personnellement comme mère, l’affirmation signifie, même indirectement, tout ce qu’exprime le rapport intime d’un fils avec sa mère. Et tout cela peut s’inclure dans l’expression «offrande de soi». L’offrande de soi est la réponse à l’amour d’une personne, et en particulier à l’amour de la mère.
La dimension mariale de la vie d’un disciple du Christ s’exprime précisément, d’une manière spéciale, par cette offrande filiale à la Mère de Dieu, qui a commencé par le testament du Rédempteur sur le Golgotha. En se livrant filialement à Marie, le chrétien, comme l’Apôtre Jean, «reçoit parmi ses biens personnels» la Mère du Christ et l’introduit dans tout l’espace de sa vie intérieure, c’est-à-dire dans son «moi» humain et chrétien: «Il l’accueillit chez lui». Il cherche ainsi à entrer dans le rayonnement de l’amour materne» avec lequel la Mère du Rédempteur«prend soin des frères de son Fils, à la naissance et à l’éducation desquels elle apporte sa coopération à la mesure du don qui est propre à chacun de par la puissance de l’Esprit du Christ. Ainsi également s’exerce la maternité selon l’Esprit, qui est devenue le rôle de Marie au pied de la Croix et au Cénacle. » (Pape Jean Paul II, lettre encyclique Redemptoris Mater, 45)
1) « Marie mère des disciples » dans la préface de la messe « Commendatio Beata Mariae Virginis »[3]
Cette préface fait mémoire de l’événement où Jésus confia le disciple à Marie et Marie au disciple (Jn 19,25-27). Ce sont les dernières paroles de Jésus sur la croix, un testament sacré. Cette parole crée, accomplit ce qu’elle dit : elle instaure un lien d’amour entre la Vierge bienheureuse et les disciples fidèles.
Quel est ce lien d’amour ? C’est un lien réciproque.
La mère est donnée comme mère aux disciples.
Aimer et accueillir Marie chez soi, ce n’est pas une initiative privée, ce n’est pas une initiative ecclésiale, c’est une initiative du Christ. Les disciples accueillent la Mère précieuse comme héritage du Maître.
Les disciples se confient en elle (cf. la très ancienne prière Suub Tuum praesidium) et écoutent la parole de la Mère (c’est-à-dire « faites tout ce qu’il vous dira » Jn 2,5) et gardent la parole du Maître.
2) Marie est « Mère des vivants » et « Reine », au calvaire :
La liturgie des heures, le 22 août, en la fête Beatae Mariae Virginis Reginae, dans l’hymne de l’office de lecture, (3e strophe)[4], Marie est célébrée comme mère des vivants et comme Reine, en lien avec l’Evangile de Jean où il y a une extraordinaire affirmation de la royauté du Christ, mais à partir de la parodie de la couronne d’épine et de la pourpre : comme le Christ est roi, de la même façon, Marie est reine en participant à la passion où elle est devenue la mère des vivants.
Eve déjà est la mère des vivants (Gn 3,20) mais dans l’ordre de la nature, et malgré sa désobéissance.
Marie est la mère des vivants dans l’ordre de la grâce, elle est mère au moment du baptême où les hommes renaissent à la grâce :
La présence de Marie au pied de la croix est un fait, ce n’est pas une idée.
La parole du Christ à sa mère est une parole fondatrice, un fait salvifique. L’événement baptismal réactualise l’événement biblique. Près des fonts baptismaux est présente Marie maintenant élevée au ciel. On pourrait visualiser par des œuvres d’art sur les fonts baptismaux cette présence de Marie.
3) Marie « mère des vivants » dans la liturgie du couronnement des images de la bienheureuse Vierge Marie.[5]
La prière est construite sur le parallèle entre Marie et Jésus :
« Ton fils s’humilia jusqu’à la mort de la croix, toi Marie, tu es vierge et servante du Seigneur,
Ton fils fut glorifié comme Roi des rois, toi tu es élue comme mère du Rédempteur et mère des vivants, et exaltée au dessus des chœurs des anges, tu règnes avec le Christ. »
4) Marie « mère de tous les vivants » dans la préface de la messe votive à « Marie mère de l’espérance. »[6]
La prière a ici la spiritualité biblique des « anawims », les pauvres du Seigneur : Marie est « ton humble servante », elle place « toute son espérance en toi Seigneur »…
Est mise en évidence la vie théologale de la Vierge, référée au Christ. Marie a espéré, elle a conçu dans la foi, elle a servi dans la charité en faveur de l’œuvre du salut, elle est devenue la mère de tous les vivants, la mère de tous les hommes.
Françoise Breynaert
[1] cf. Le développement de Jean Paul II, Redemptoris Mater 40
[2] Formulaire 30, collectio missale.
[4] Cet hymne est l’œuvre du père Vittorio Genovesi (+ 1967). Ut Christus alta ab arbore /rex purpuratus sanguine / sic passionis particeps / tu mater es viventium.
[5] Ordo coronandi imaginen b. Mariae Virginis. Prex gratiarum actionis, p. 11