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16e dimanche ordinaire (B)
Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.
Evangile Mc 6, 30-34 16e dimanche ordinaire B (77.08 Ko)
Podcast sur : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#
Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30).
Psaume (Ps 22 (23), 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6)
Deuxième lecture (Ep 2, 13-18)
Première lecture (Jr 23, 1-6)
Quel malheur pour vous, pasteurs ! Vous laissez périr et vous dispersez les brebis de mon pâturage – oracle du Seigneur ! C’est pourquoi, ainsi parle le Seigneur, le Dieu d’Israël, contre les pasteurs qui conduisent mon peuple : Vous avez dispersé mes brebis, vous les avez chassées, et vous ne vous êtes pas occupés d’elles. Eh bien ! Je vais m’occuper de vous, à cause de la malice de vos actes – oracle du Seigneur. Puis, je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis de tous les pays où je les ai chassées. Je les ramènerai dans leur enclos, elles seront fécondes et se multiplieront. Je susciterai pour elles des pasteurs qui les conduiront ; elles ne seront plus apeurées ni effrayées, et aucune ne sera perdue – oracle du Seigneur. Voici venir des jours – oracle du Seigneur, où je susciterai pour David un Germe juste : il régnera en vrai roi, il agira avec intelligence, il exercera dans le pays le droit et la justice. En ces jours-là, Juda sera sauvé, et Israël habitera en sécurité. Voici le nom qu’on lui donnera : « Le-Seigneur-est-notre-justice. » – Parole du Seigneur.
Un peu d’histoire. Babylone écrasa l’armée égyptienne à Karkemish et domine Canaan. Au roi Joaquim succèda le jeune Joakîn qui n’opposa aucune résistance et partit en exil à Babylone. Babylone nomma alors Sédécias roi de Juda. Sédécias retourna aux idoles et se révolta contre Babylone ; Jérémie, qui a critiqué ouvertement la politique de Joaquim et de Sédécias (Jr 21-22), est jeté dans une citerne (Jr 38, 6-13). Finalement, Sédécias est emmené en exil les yeux crevés après avoir vu ses fils égorgés. Jérusalem est détruite.
Mais Jérémie apporte des clés de discernement utiles à toutes les époques.
« Vous laissez périr et vous dispersez les brebis de mon pâturage – oracle du Seigneur ! C’est pourquoi, ainsi parle le Seigneur, le Dieu d’Israël, contre les pasteurs qui conduisent mon peuple : Vous avez dispersé mes brebis, vous les avez chassées, et vous ne vous êtes pas occupés d’elles. »
« Les brebis de mon pâturage » : les pasteurs doivent considérer que les brebis ne sont pas les leurs, elles ne leur appartiennent pas, elles appartiennent au Seigneur. Par exemple, le responsable ou le fondateur d’une œuvre, n’a pas le droit d’utiliser les compétences de quelqu’un contre son gré, d’utiliser quelqu’un pour lui-même, pour se faire valoir, lui ou son œuvre qui pour diverses raisons n’attire pas l’assentiment. Le pasteur ne doit pas confondre la volonté de Dieu et le bien particulier de la pérennité de son œuvre à lui.
« Vous laissez périr les brebis » : le monde est plein de dangers, et sans l’action salvifique de Dieu, les gens sont happés par la puissance du mal, qui, depuis le péché originel, étend son emprise sur le monde. Le berger doit assumer son rôle protecteur. Trop souvent, les bergers ne veulent pas prendre de risque, ils n’affrontent pas le danger, ils se compromettent avec les forces troubles et avec le pouvoir en place. C’est plus facile. Cela leur permet des honneurs et des richesses, une propagande positive. Mais c’est un chemin de ruine, un chemin de mort. Et les brebis meurent, écoeurées par les scandales, choquées par les injustices, rongées de désespoir.
« Vous dispersez les brebis ». Le berger qui n’assume pas son rôle protecteur vis-à-vis de l’emprise du mal disperse les brebis. Et c’est facile à comprendre. Certaines brebis aux prises avec l’injustice vont s’éloigner. Et si certaines prennent la parole, les autres les accuseront de médisance ou de troubler la tranquillité, en s’appuyant sur le consensus mou créé par la lâcheté du mauvais berger. Mensonges et demi-vérité vont démultiplier les avis contraires, plus personne n’ayant de lumière pour trouver le juste chemin. Et chacune, souvent de bonne foi, va son chemin, mais les brebis se dispersent…
« Vous les avez chassées ». Pourquoi des bergers chasseraient-ils des brebis ? Eh bien, parce qu’elles les dérangent. Par exemple parce qu’elles demandent à être protégées d’un mal, d’un danger, elles dénoncent une compromission ou une malversation. Ou bien parce qu’elles demandent une meilleure nourriture, un enseignement plus cohérent, plus précis, un perfectionnement. Alors, les bergers les chassent. Et il y a bien des manières de chasser des gens. Il arrive que quelqu’un soit poussé à la faute. Il arrive que l’on fasse des manœuvres financières pour avoir le prétexte d’un licenciement économique… On peut aussi chasser les gens en leur rendant la vie impossible par un stress incessant. « Vous les avez chassées ».
« Vous avez dispersé mes brebis, vous les avez chassées, et vous ne vous êtes pas occupés d’elles. Eh bien ! Je vais m’occuper de vous, à cause de la malice de vos actes – oracle du Seigneur. » Le Seigneur lui-même va s’occuper de ces mauvais bergers, ce sera une belle correction : « Quel malheur pour vous, pasteurs ! » Il est important que les pasteurs écoutent cet oracle, en effet, ils ne doivent pas considérer leur place de chef comme une toute-puissance. Ils ne sont que des intendants. Personne n’aime être corrigé, s’ils veulent éviter de souffrir, alors qu’ils veillent sur leur conduite…
Il est important aussi que les brebis écoutent cet oracle. Nous ne pouvons pas changer quelqu’un, nous pouvons dire ceci ou cela, mais c’est tout. Les bergers sont les bergers, ils sont en position de chef. Les brebis ne doivent pas obéir à un ordre mauvais, mais il ne leur revient pas d’être les guides des bergers, il faut donc que les brebis s’en remettre à Dieu, et Dieu a promis d’intervenir : « Je vais m’occuper de vous, à cause de la malice de vos actes – oracle du Seigneur ».
« Puis, je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis de tous les pays où je les ai chassées. Je les ramènerai dans leur enclos, elles seront fécondes et se multiplieront. » Ici, on change de registre, c’est Dieu qui a chassé les brebis dans divers pays : il s’agit de la dispersion des tribus du royaume du Nord au temps de la chute de Samarie (-721 avant J-C) ou de l’exil à Babylone (en -587 avant J-C). Et Dieu promet de les ramener dans leur enclos, c’est-à-dire la terre d’Israël.
« Je susciterai pour elles des pasteurs qui les conduiront ; elles ne seront plus apeurées ni effrayées, et aucune ne sera perdue – oracle du Seigneur. » Après l’exil à Babylone, il y aura en effet d’autres pasteurs, pendant un certain temps de paix. Pensons par exemple à Néhémie et Esdras, jusqu’à Jean-Baptiste.
« Voici venir des jours – oracle du Seigneur, où je susciterai pour David un Germe juste : il régnera en vrai roi, il agira avec intelligence, il exercera dans le pays le droit et la justice. En ces jours-là, Juda [la Judée] sera sauvé, et Israël [autour de Samarie] habitera en sécurité. Voici le nom qu’on lui donnera : « Le-Seigneur-est-notre-justice. » Au temps de Jérémie, le roi Sédécias porte un nom qui signifie « Dieu me fera justice », mais ce roi n’était pas juste, et à cette injustice, l’oracle de Jérémie répond par la promesse d’un autre roi que l’on appellera « Le-Seigneur-est-notre-justice ». Et nous verrons dans l’évangile que Jésus attire, et il rassemble autour de lui les foules qui sont comme des brebis qui n’ont pas de berger.
Psaume (Ps 22 (23), 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6)
Le Seigneur est mon berger : je ne manque de rien. Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer. Il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre ; il me conduit par le juste chemin pour l’honneur de son nom. Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ton bâton me guide et me rassure. Tu prépares la table pour moi devant mes ennemis ; tu répands le parfum sur ma tête, ma coupe est débordante. Grâce et bonheur m’accompagnent tous les jours de ma vie ; j’habiterai la maison du Seigneur pour la durée de mes jours.
Nous suivrons sainte Thérèse d’Avila, « Le Château intérieur » dans les Oeuvres complètes, Desclée de Brouwer, Paris 1995
Le psaume : « J’habiterai la maison du Seigneur pour la durée de mes jours » Sainte Thérèse d’Avila : « Considérons notre âme comme un château fait tout entier d’un seul diamant ou d’un très clair cristal. […] Considérons donc que ce château a, comme je l’ai dit, nombre de demeures, les unes en haut, les autres en bas, les autres sur les côtés ; et au centre, au milieu de toutes, se trouve la principale, où se passent les choses les plus secrètes entre Dieu et l’âme. » (Château intérieur, Première demeure, I, 1-3, p. 871-872)
Le psaume : « Il me conduit par le juste chemin pour l’honneur de son nom ». Sainte Thérèse d’Avila : « Nous ne pouvons savoir si nous aimons Dieu, bien que d’importants indices nous fassent entendre que nous l’aimons, mais nous pouvons savoir, Oui, si nous avons l’amour du prochain. Et soyez certaines que plus vous ferez de progrès dans cet amour là, plus vous en ferez dans l’amour de Dieu ; car l’amour de Sa Majesté [c’est ainsi que sainte Thérèse appelle Dieu] pour nous est si grand qu’en retour de celui que nous avons pour notre prochain il augmentera de mille manières celui que nous avons pour Sa Majesté : je ne puis en douter ». (Château intérieur, 5e demeure III, 8, p. 941)
« Si vous avez cet amour du prochain, je vous affirme que vous ne manquerez pas d’obtenir de Sa Majesté l’union dont j’ai parlé. Si vous constatiez qu’il vous fait défaut, même si vous avez de la ferveur et des joies spirituelles : même si vous croyez être parvenues à l’union, avoir eu une quelconque petite extase dans l’oraison de quiétude, (certaines imagineront immédiatement que tout est fait), croyez-moi quand je vous dis que vous n’avez pas obtenu l’union, demandez à Notre Seigneur de vous donner, à la perfection, cet amour du prochain, et laissez faire Sa Majesté : Elle vous donnera plus que vous ne sauriez désirer, à condition que vous fassiez des efforts - et que vous recherchiez, tant que vous le pourrez, cet amour-là ; contraignez votre volonté à être en tout conforme à celle de vos sœurs ; même si vous perdez vos droits, oubliez-vous pour elles, pour beaucoup que cela révolte votre nature ; et cherchez à assumer des tâches pour en délivrer votre prochain, lorsque vous en aurez l’occasion. » (5e demeure, III, 12, p. 943)
« Le Seigneur est mon berger » dit le psaume. Au début de la 6e demeure, Thérèse d’Avila explique, je résume, que le Seigneur conduit l’âme. Parfois, il lui fait sentir sa présence, sans se manifester davantage, ce qui provoque une blessure, comme une flèche d’amour, cependant la douleur est très douce. Il donne des grâces, mais il faut un grand courage à l’âme pour s’ouvrir à ces grâces. Et je cite :
« Vous allez croire encore que la personne qui jouit de choses aussi hautes ne méditera pas sur les mystères de l’Humanité très sacrée de Notre Seigneur Jésus-Christ, puisque tout entière consacrée à l’amour. J’ai longuement écrit par ailleurs sur ce sujet, bien qu’on m’ait opposé que je n’y comprenais rien, que ce sont là des chemins par lesquels Notre Seigneur nous conduit, et qu’une fois faits les premiers pas, mieux vaut s’occuper des choses de la Divinité et fuir les choses corporelles, on ne me fera pas confesser que tel soit le bon chemin […] 6. Certaines âmes croiront peut-être aussi qu’il leur est impossible de penser à la Passion ; dans ce cas, elles pourront moins encore penser à la Très Sainte Vierge, ni à la vie des Saints, dont la mémoire nous est si profitable et si encourageante. Je ne puis imaginer à quoi elles songent, car l’éloignement de toute chose corporelle est le fait d’esprits angéliques toujours enflammés d’amour, alors que nous, qui vivons dans un corps mortel, nous avons besoin du commerce, de la pensée de la société de ceux qui, dans ce corps, ont réalisé pour Dieu de si hauts faits. Nous devons d’autant moins travailler à nous écarter de notre plus grand bien, de notre remède le plus efficace, qui est l’Humanité sacrée de Notre Seigneur Jésus-Christ. […] Je leur certifie [à ces âmes qui veulent se passer de la méditation des Écritures ou de la contemplation de l’Humanité de Jésus] qu’elles ne pénétreront pas dans les deux dernières demeures, car si elles s’éloignent du guide, qui est le bon Jésus, elles n’en trouveront pas le chemin ; ce sera déjà beaucoup si elles sont assurées de se maintenir dans les demeures précédentes. Le Seigneur a dit lui-même qu’il est le chemin (Jn 14, 6), il dit aussi qu’il est la lumière et que nul ne peut aller au Père que par lui ». (6e demeure VII, 6, p. 988)
« Le Seigneur est mon berger » dit le psaume. […] Serait-il bon pour l’âme de rester dans cette sécheresse, en attendant, comme notre père Élie, que le feu du ciel brûle ce sacrifice qu’elle fait d’elle-même à Dieu ? Non, certes, il ne sied pas d’attendre des miracles. […] Je crois, quant à moi, que cela [penser à la Passion et aux mystères de la sainte Humanité du Christ, à la Vierge Marie, et aux saints] nous est nécessaire jusqu’à notre mort, si haute que soit notre oraison. (6e demeure VII, 8, p. 989)
« A la vérité, l’âme que le Seigneur [le Seigneur, pas une drogue ou je ne sais quelle plante] introduit dans la septième Demeure se fait une habitude de ne pas s’éloigner du Christ Notre Seigneur, elle s’attache à ses pas selon un mode admirable par lequel, humain et divin à la fois, il demeure en sa compagnie. » (6e demeure VII, 9, p. 990)
Le psaume : « Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer. Il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre ; il me conduit par le juste chemin pour l’honneur de son nom. Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi, ton bâton [c’est le bâton du berger qui écarte les difficultés] me guide et me rassure ». Sainte Thérèse d’Avila : « Il est des âmes qui ont pour principe, lorsqu’elles arrivent à l’oraison de quiétude et à goûter les régals et délices qu’accorde le Seigneur, de croire que c’est une grande chose que de ne rien faire d’autre que de les savourer, et que c’est même le moyen d’y parvenir. Mais croyez-moi, ne vous laissez pas inhiber à ce point, la vie est longue, les épreuves nombreuses, et nous devons considérer comment notre modèle le Christ les a endurées, et même ses apôtres, ses saints, afin de les supporter avec perfection » (6e demeure VII, 13, p. 991)
Chers auditeurs, retenez-le, le Seigneur est mon berger, qu’il soit votre berger, suivez-le en méditant sa vie.
Deuxième lecture (Ep 2, 13-18)
Frères, maintenant, dans le Christ Jésus, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ. C’est lui, le Christ, qui est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine ; il a supprimé les prescriptions juridiques de la loi de Moïse. Ainsi, à partir des deux, le Juif et le païen, il a voulu créer en lui un seul Homme nouveau en faisant la paix, et réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ; en sa personne, il a tué la haine. Il est venu annoncer la bonne nouvelle de la paix, la paix pour vous qui étiez loin, la paix pour ceux qui étaient proches. Par lui, en effet, les uns et les autres, nous avons, dans un seul Esprit, accès auprès du Père. – Parole du Seigneur.
La finale constitue le sommet de cette lecture, et nous parle de notre divinisation : « Par lui [le Christ Jésus] en effet, les uns et les autres, nous avons, dans un seul Esprit, accès auprès du Père ». Cette divinisation se fait par Jésus dans l’Esprit. n’y a pas de divinisation sans le Christ Jésus. Il n’y a pas de divinisation par un autre Esprit que par l’Esprit de Jésus qui est un Esprit filial. Nous accédons à l’Esprit Saint par Jésus. Et dans cet Esprit nous accédons au Père. Il n’y a pas de divinisation s’il y a une révolte contre Dieu le Père, notre créateur.
Les commandements divins ne sont pas rejetés dans une sorte d’au-delà du bien et du mal nietzschéen, ses commandements marquent au contraire le chemin qui mène à Dieu, la voie du salut. Jésus nous recommande de garder les commandements et, dans son sermon sur la montagne il a insisté : je ne suis pas venu abolir (abroger la loi), mais l’accomplir (Mt 5, 17). Ce que Jésus a supprimé, ce sont « les prescriptions juridiques de la loi de Moïse », ces prescriptions avaient pour but de séparer les Juifs des païens afin qu’ils puissent s’affermir dans la foi au Dieu vivant et s’éloigner des pratiques idolâtriques. Formant ainsi un peuple consacré au Seigneur, ils ont préparé la venue du Messie, Jésus. Jésus peut alors abolir ces prescriptions juridiques, elles ont accompli leur rôle préparatoire et il ne convient pas de continuer à séparer Israël des nations. Il convient au contraire d’unir juifs et païens dans l’adoration du même Dieu qui s’est révélé à tous, par Jésus.
Cette lecture nous parle de la paix apportée par Jésus : il a réconcilié tous les hommes avec Dieu par sa croix, mais nous avons retiré les calvaires de nos routes et les crucifix de nos bâtiments, et quand nous les avons laissés, la plupart n’ont pas l’inscription INRI qui désigne Jésus de Nazareth, le fils de David, héritier légitime et roi des Juifs. Cette inscription distingue la croix de Jésus de celle de n’importe quel condamné à la crucifixion. Il n’y a que la croix de Jésus qui réconcilie les hommes, parce que sur la croix, Jésus a prié : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». Il n’y a que la croix de Jésus qui réconcilie les hommes parce que pour réconcilier les hommes entre eux, il faut d’abord réconcilier chacun avec Dieu le Père, il faut refaire le chemin oublié depuis Adam qui unit la volonté humaine à la volonté divine. Il a voulu « réconcilier avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix ». Il n’y a que la croix de Jésus, qui, ayant réconcilié chacun avec Dieu le Père, peut réunir les hommes comme des frères.
Le sang de Jésus-Christ doit être adoré, vénéré, car il est rempli de sainteté et de compassion… Jésus n’a pas rendu le mal pour le mal, ni quand on a voulu l’arrêter, ni après sa résurrection. Jésus a intercédé pour les pécheurs.
Le Christ a manifesté une grande force durant son chemin de croix, quand il a porté une croix très lourde après une terrible flagellation. Le sang qu’il a versé contient une puissance divine, une force qui vient de l’union de Jésus à son Père. Le sang de Jésus-Christ, que nous recevons sacramentellement à l’Eucharistie, est notre force et notre puissance.
Saint Paul dit « Frères, maintenant, dans le Christ Jésus, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ » (Eph 2, 13). Le sang de Jésus-Christ réalise avec les hommes bien davantage que l’Alliance au mont Sinaï de Dieu avec le peuple hébreu, c’est le sang de l’Alliance qui concerne toutes les créatures depuis la création d’Adam et Eve, c’est le sang de l’Alliance éternelle du dessein du Créateur, selon le but pour lequel nous avons été voulus depuis toute éternité. Le christianisme est une nouvelle Alliance, et le précieux Sang de Jésus-Christ peut être appelé fondement de la Foi chrétienne…
Jésus est le bon berger qui donne sa vie pour ses brebis (cf. Jn 10), il a versé son sang, mais il a veillé à ce qu’aucun de ses disciples ne soit arrêté au Gethsémani ; une fois qu’il est mort et ressuscité, son sang continue de nous protéger contre les royaumes occultes et contre les dévots de Satan.
Ayant reçu tant d’amour de la part de Dieu, notre cœur s’enflamme à son tour, le sang que Jésus a versé, allume sur la terre le feu de la Divine Charité…
Cette charité qui vient de Jésus, par sa croix, par son sang, est à la fois la terreur des démons et le secours des esclaves du Malin… Il lave les péchés du monde, il purifie le monde.
Très souvent dans les évangiles, Jésus dit « ta foi t’a sauvé », et en araméen, nous avons simplement le verbe vivre, il faut traduire « ta foi t’a vivifié ». En s’approchant avec confiance de la croix de Jésus, nous sommes vivifiés, nous recevons une onction spirituelle, nous n’avons plus peur de la mort et sommes remplis de hardiesse, déjà nous goûtons la vie éternelle, un avant-goût de la résurrection future. À l’Eucharistie, le Vin Sacré, c’est le sang du Christ mort et ressuscité, c'est le sang de la résurrection. Les anges du Ciel n’ont pas de corps comme nous en avons, mais ils goûtent l’amour ardent du Christ, de sorte que l’on peut dire que le pain et le vin eucharistique sont le pain du ciel ou le pain et le breuvage des anges du ciel. Même Dieu le Père est consolé par Jésus, par sa Passion d’amour, par le sang infiniment pur et saint qu’il a accepté de verser, révélant la sagesse divine et la miséricorde du Père.
En ces jours où le monde traverse des heures graves, ayons confiance en Jésus. Aimons Jésus. Aimons sa croix source de paix. Prions devant la croix pour la paix.
Nous savons que Jésus reviendra dans la gloire, et, comme le soir de Pâque, de ses plaies rayonnera l’amour. Soyons prêts à nous unir à lui pour entrer dans l’ère de paix que l’Apocalypse décrit comme une terre nouvelle. Ne l’oublions pas, la volonté du Père se réalisera sur la terre comme au ciel, sinon pourquoi nous aurait-il demander de le prier en ce sens ? Et cette volonté est une volonté de paix.
Aimons la croix de Jésus, il a versé son sang, il n’a pas versé le sang des autres. Ne jugeons pas le monde à la place de Jésus, qui le fera lors de son retour glorieux, aimons Jésus, aimons la paix, prions pour la paix.
Évangile (Mc 6, 30-34)
Prenons goût à mémoriser l’évangile avec notre corps, dans une mémoire du corps, en nous balançant un peu de gauche à droite comme en marchant, avec cette traduction que j’ai faite depuis l’araméen.
« 30 Et les Apôtres se rassemblèrent auprès de Jésus,
et lui dirent tout ce qu’ils avaient fait / et tout ce qu’ils avaient enseigné.
31 Et il leur dit :
‘Venez, allons à la campagne, nous seuls, / et reposez-vous un peu.
Car il y avait beaucoup d'allants / et de venants,
et ils n’avaient pas le temps / de manger.
32 Et ils s’en allèrent vers un endroit désert / en bateau, eux seul.
33 Et beaucoup les virent tandis qu’ils s’en allaient, / et les reconnurent ;
et, par la terre, depuis toutes les villes / ils coururent là-bas au-devant de lui.
34 Et Jésus sortit, vit des foules nombreuses, / et fut pris de pitié pour elles.
car elles ressemblaient / à des brebis qui n’ont pas de berger.
Et il commença à leur enseigner / beaucoup de choses ».
Jésus veut faire reposer les disciples. En araméen, ḏaḇrā c’est la campagne, peut-être aussi le désert mais on a d’autres mots pour dire désert : ḥūrbā est un nom ou un adjectif qui signifie désert, avec la nuance de solitude, voir même de ruine ou de désolation. Et les foules suivent Jésus dans cet endroit désert, qui leur ressemble en un sens…
Les apôtres se rassemblent autour de Jésus, non pas autour d’un projet humain, mais autour de Jésus. Nos projets humains sont humains, et comportent souvent de la corruption, des contre-vérités, c’est pourquoi ils rassemblent mal, ils nous divisent. Les apôtres se rassemblent autour de la personne de Jésus, car il y a du divin dans leur rassemblement autour de Jésus. Et Jésus attire les foules, parce que les foules ne perçoivent pas en lui un simple projet humain, mais ils perçoivent en lui le divin, la visite de Dieu… On n’a plus le temps de manger… Et il n’y a pas moyen d’échapper à la quête de la foule. Jésus attire, et il rassemble autour de lui les brebis qui n’ont pas de berger, ceux que de mauvais bergers laissent périr, dispersent ou chassent, comme dans la première lecture. Jésus, lui, il les attire et les rassemble.
Les foules s’attachent à Jésus, et elles sont heureuses et peuvent dire : « Le Seigneur est mon berger : je ne manque de rien. Sur des prés d’herbe fraîche, il me fait reposer. Il me mène vers les eaux tranquilles et me fait revivre ; il me conduit par le juste chemin pour l’honneur de son nom. Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ton bâton me guide et me rassure… ».
Reprenons l’évangile, et goûtons très simplement cet évangile avec le Commentaire de saint Bède le Vénérable (+ 735), CCL 120, 5 10-5
« Les Apôtres se réunissent auprès de Jésus et lui rapportent tout ce qu'ils ont fait et enseigné (Mc 6,30). Les Apôtres ne sont pas seuls lorsqu'ils rapportent au Seigneur ce qu'ils ont fait et enseigné, mais ses disciples et ceux de Jean Baptiste viennent aussi lui annoncer ce que Jean a souffert pendant que les Apôtres enseignaient. Et il leur dit : Venez à l'écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. Pour faire comprendre combien il était nécessaire d'accorder du repos aux disciples, l'évangéliste poursuit en disant : De fait, les arrivants et les partants étaient si nombreux qu'on n'avait même pas le temps de manger (Mc 6,31). La fatigue de ceux qui enseignaient, ainsi que l'ardeur de ceux qui s'instruisaient, montrent bien ici comme on était heureux en ce temps-là.
Plût au ciel qu'il en fût de même encore à notre époque, qu'un grand concours de fidèles se pressât autour des ministres de la Parole pour les entendre, sans même leur laisser le temps de reprendre des forces ! Car lorsqu'ils manquent du temps nécessaire pour prendre soin d'eux-mêmes, ils ont encore moins la possibilité de s'abandonner aux séductions de l'âme et du corps. Ou plutôt, du fait que l'on réclame d'eux à temps et à contretemps la parole de foi et le ministère du salut, ils brûlent du désir de méditer les pensées célestes et de les mettre sans cesse en pratique, de sorte que leurs actes ne démentent pas leurs enseignements.
« Ils partirent donc dans la barque pour un endroit désert, à l'écart (Mc 6,32). Les disciples ne montèrent pas seuls dans la barque, mais ils prirent avec eux le Seigneur et gagnèrent un endroit désert. Les gens les virent s'éloigner et beaucoup les reconnurent. Alors, à pied, de toutes les villes, ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux (Mc 6,33). En disant qu'ils partirent à pied et arrivèrent avant eux, l'évangéliste laisse entendre que les disciples et le Seigneur n'ont pas navigué jusqu'à l'autre rive de la mer de Galilée ou du Jourdain, mais qu'après avoir traversé en barque un bras de mer ou une crique, ils sont parvenus à un endroit proche, situé dans la même région, et que les gens du pays pouvaient aussi gagner à pied.
En débarquant, Jésus vit une foule nombreuse, et il en eut pitié, parce qu'ils étaient comme des brebis qui n'ont pas de berger, et il se mit à les instruire longuement (Mc 6,34). Matthieu donne plus d'explications sur la manière dont Jésus eut pitié d'eux, quand il dit : Et il en eut pitié, et il guérit leurs infirmes (Mt 14,14). Car avoir pitié des pauvres et de ceux qui n'ont pas de berger, c'est précisément leur ouvrir le chemin de la vérité en les instruisant, faire disparaître leurs infirmités physiques en les soignant, mais aussi les nourrir quand ils ont faim, et les encourager ainsi à louer la générosité divine. C'est ce que Jésus a fait, comme nous le rappelle encore la suite de cet évangile.
Il a en outre mis à l'épreuve la foi de la foule, et l'ayant éprouvée, lui a donné en retour une récompense proportionnée. Il a gagné en effet un endroit isolé pour voir si les gens auraient soin de les suivre. Eux l'ont suivi. Ils ont pris en toute hâte la route du désert, non sur des ânes ou des véhicules de tout genre, mais à pied, et ils ont montré, par cet effort personnel, quel grand soin ils avaient de leur salut.
En retour, Jésus a accueilli ces gens fatigués. Comme sauveur et médecin plein de puissance et de bonté, il a instruit les ignorants, guéri les malades et nourri les affamés, manifestant ainsi quelle grande joie lui procure l'amour des croyants. »
Date de dernière mise à jour : 15/06/2024