20e dimanche ordinaire (B)

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Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.

B 20e ordinaire jn 6 51 58B - 20e dimanche ordinaire Jn 6, 51 58 (92.71 Ko)

Podcast sur  : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#

Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30). 

 

Première lecture (Pr 9, 1-6)

Psaume (Ps 33 (34), 2-3, 10-11, 12-13, 14-15)

Deuxième lecture (Ep 5, 15-20)

Évangile (Jn 6, 51-58)

Première lecture (Pr 9, 1-6)

La Sagesse a bâti sa maison, elle a taillé sept colonnes. Elle a tué ses bêtes, et préparé son vin, puis a dressé la table. Elle a envoyé ses servantes, elle appelle sur les hauteurs de la cité : « Vous, étourdis, passez par ici ! » À qui manque de bon sens, elle dit : « Venez, mangez de mon pain, buvez le vin que j’ai préparé. Quittez l’étourderie et vous vivrez, prenez le chemin de l’intelligence. » – Parole du Seigneur

Chers auditeurs, avant de commenter cette lecture en parlant de Marie nous allons raconter un exemple vécu :

Alors qu’il effectuait un séjour en prison, au début des années 2000, à la suite de méfaits commis sous l’emprise de la drogue, Vincent Paul-Marie se convertit subitement et décide de changer de vie. Il est désormais modérateur de la Fraternité "Mère de la miséricorde" et a fait de son ancienne addiction, la drogue, le combat de sa vie. En Côte d’Ivoire, il dirige un centre à Adjamé près d'Abidjan qui accueille 27 personnes dépendantes à la drogue, un centre qui est au maximum de ses capacités. Avec des experts, médecins et psychologues, et toute une équipe d’encadrement, il veut faire sortir les jeunes de ce fléau.

« Moi, j’étais esclave de la drogue, je prenais des comprimés, du cannabis. Quand je suis sorti de prison, le Seigneur m'a dit : ‘Je vais t’utiliser, comme tu étais bandit, voleur… Tout ça va être utilisé pour fonder une communauté qui va se charger d'aller vers ces jeunes-là pour les ramener à moi’. Donc, je m'appuie sur mon expérience de vie, ce que j'ai vécu, sur la manière dont je suis sorti de la drogue. »

Dans son centre, les jeunes sont suivis médicalement et psychologiquement, mais doivent également participer aux temps de prière communautaires. Un point indispensable, qui vient soutenir la thérapie pour chacun des pensionnaires. « C'est une question de discipline. Pour certains, la crise de manque est tellement foret qu’ils prennent des médicaments. Et après, progressivement, ils arrêtent. Le médicament t'aide à supporter, mais ce n'est pas en réalité le médicament qui peut te donner la grâce de changer, parce qu’on peut faire la cure de désintoxication, mais le cœur a besoin d'être touché. Le Christ lui-même a dit : ‘Priez afin de ne pas tomber dans la tentation’ »

Vincent Paul-Marie estime que prier pour demander la grâce de Dieu fait partie intégrante de la guérison des personnes addictes à la drogue parce que « sans la grâce de Dieu, on ne peut pas ». L’ancien toxicomane attribue lui-même sa propre guérison à son assiduité dans la prière, fidélité qu’il conserve depuis sa conversion il y a 22 ans.

« Si tu ne demandes pas la grâce à Dieu, qu'est ce qui prouve que tu veux vraiment changer ? Donc c'est le désir que tu as de changer qui doit t'amener à prier », souligne-t-il.

Modérateur de sa communauté, il voit les fruits du centre qu’il a mis en place. Certains encadrants actuels sont d’anciens toxicomanes, d’anciens résidents du centre ont réussi à reprendre des études et un travail…

Marie trône de la sagesse

Saint Louis-Marie de Montfort [1] est un saint prédicateur. Ses méthodes d’apostolat s’inspirent de celles de ses prédécesseurs : cantiques, conférences, conférences dialoguées, il permettait à l’assistance de l’interroger ; processions qu’il savait organiser dans un grand recueillement juste après son sermon ; confession et amende honorable ; communion ; rénovation des vœux du baptême. Son originalité se manifeste dans son choix de faire prier devant les tableaux du rosaire, et dans sa proposition, du « Contrat d’alliance » : « Je me donne tout entier à Jésus Christ par les mains de Marie pour porter ma croix à sa suite tous les jours de ma vie ». Cette brève prière est la traduction populaire de la consécration ou parfaite dévotion, qu’il ne réservait pas à l’élite, mais qu’il prêchait à tous. Par cette prière beaucoup de pécheurs endurcis se sont convertis, et beaucoup de chrétiens sont devenus fidèles, persévérants [2].

Il enseigne que la sagesse divine est l’une (la 10ème) des principales vertus de la Très Sainte Vierge (VD 108). Elle lui est communiquée par le Christ : « Dieu le Fils a consenti qu’elle [Marie] ne parlât presque point, quoiqu’il lui eût communiqué sa sagesse. » (VD 4).

Comme la Sagesse, Marie « aime ceux qui l’aiment (Pr 8, 17) » (ASE 206) ; Comme la Sagesse, Marie «est occupée tous les jours à chercher des âmes dignes d’elle (Sg 6,17) » (ASE 207). A Marie sont attribuées des paroles de la Sagesse (VD 175, Cf. VD 264,3) et des actions de la Sagesse (VD 208).

Il nous dit : « Le second devoir de charité que la Sainte Vierge exerce envers ses fidèles serviteurs, c’est qu’elle les entretient de tout pour le corps et pour l’âme. Elle leur donne des habits doublés (Pr 31,21), comme nous venons de voir [3] ; elle leur donne à manger les mets les plus excellents de la table de Dieu; elle leur donne à manger le pain de vie, qu’elle a formé ; A generationibus meis implemini (Si 24,26) : mes chers enfants, leur dit-elle, sous le nom de la Sagesse, remplissez-vous de mes générations, c’est-à-dire de Jésus, le fruit de vie, que j’ai mis au monde pour vous. - Venite, comedite panem meum et bibite vinum quod miscui vobis (Pr 9,5); comedite, et bibite, et inebriamini, carissimi (Ct 5,1) : Venez, leur répète-t-elle en un autre endroit, manger mon pain (Pr 9,5), qui est Jésus, et buvez le vin de son amour (Ct 5,1), que je vous ai mêlé avec le lait de mes mamelles. » (VD 208)

Montfort s’inspire du Siracide [4] parlant de la Sagesse : « In Jacob inhabita. (Si 24, 13 Vulgate) » ou « Je me suis enracinée chez un peuple plein de gloire, dans le domaine du Seigneur, en son patrimoine. J’y ai grandi comme le cèdre du Liban, comme le cyprès sur le mont Hermon. » (Si 24, 12-13) Et il applique cette image à Marie : « C’est à Marie que Dieu le Père a dit: In Jacob inhabita : Ma Fille, demeurez en Jacob, c’est-à-dire dans mes prédestinés figurés par Jacob. [Dieu n’a prédestiné personne au mal, l’idée de prédestination veut dire ici que ce qui est dit ici correspond au projet du Créateur]. C’est à Marie que Dieu le Fils a dit : In Israel haereditare : Ma chère Mère, ayez votre héritage en Israël, c’est-à-dire dans les prédestinés. Enfin, c’est à Marie que le Saint-Esprit a dit: In electis meis mitte radices : Jetez, ma fidèle épouse, des racines en mes élus […] et il la laisse y jeter les racines d’une profonde humilité, d’une ardente charité... » (Secret de Marie 15)

Et encore : « Ceux qui sont en moi pour travailler à leur salut ne pécheront point, dit-elle avec la Sagesse. (Si 24,30) » est interprété ainsi : ceux qui demeurent en la Sainte Vierge en esprit ne pécheront point ou ne feront point de péché considérable (VD 175 et 264).

Marie s’enracine et elle reçoit la mission de faire sa demeure dans les enfants de Dieu afin qu’ils aient Dieu pour Père (VD 30) et afin que le Fils s’incarne en eux (VD 31) et qu’ils deviennent l’image de Marie (VD 34). Marie, avec l’Esprit Saint, forme les saints (VD 35-36, Cf. Sg 7,27).

Psaume (Ps 33 (34), 2-3, 10-11, 12-13, 14-15)

Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres. Je me glorifierai dans le Seigneur : que les pauvres m’entendent et soient en fête ! Saints du Seigneur, adorez-le : rien ne manque à ceux qui le craignent. Des riches ont tout perdu, ils ont faim ; qui cherche le Seigneur ne manquera d’aucun bien. Venez, mes fils, écoutez-moi, que je vous enseigne la crainte du Seigneur. Qui donc aime la vie et désire les jours où il verra le bonheur ? Garde ta langue du mal et tes lèvres des paroles perfides. Évite le mal, fais ce qui est bien, poursuis la paix, recherche-la.

Celui qui prie, qui bénit Dieu et qui le loue, bénit Dieu qui vient au secours de la veuve et de l’orphelin, il intercède pour eux, il prie pour eux et se laisse inspirer par Dieu pour trouver le moyen de leur venir en aide, et en louant le Seigneur, il trouve aussi la bonne attitude à leur égard, comme l’exemple, donné dans le commentaire de la première lecture, de la Fraternité "Mère de la miséricorde", à Adjamé près d'Abidjan qui accueille 27 personnes dépendantes à la drogue, et les achemine vers une vie libérée de cette addiction. Ainsi, « Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres. Je me glorifierai dans le Seigneur : que les pauvres m’entendent et soient en fête ! »

Le psaume nous invite alors à l’adoration. L’adoration est l’attitude qui nous fait reconnaitre en Dieu notre Créateur, la source de notre existence, Celui qui soutient notre être, notre souffle, chacun de nos pas, chaque battement de notre cœur.

L’adoration est l’attitude qui nous fait percevoir la présence divine dans nos vies. L’adoration est l’attitude par laquelle nous percevons quelque chose de sa grandeur, de sa beauté ineffable, de son amour incommensurable puisque Dieu ira jusqu’à donner son Fils pour nous sauver. Celui qui adore Dieu se sent en sécurité, parce qu’il touche l’éternité. Celui qui adore Dieu, même s’il est dans une situation difficile et dangereuse, perçoit le poids de la gloire divine, et, en comparaison, toutes ses difficultés présentes sont légères, presque inconsistante devant ce qui a un poids d’éternité. Adorer Dieu, c’est se savoir aimé de Dieu. Adorer Dieu, c’est compter sur son aide. « Saints du Seigneur, adorez-le : rien ne manque à ceux qui le craignent. Des riches ont tout perdu, ils ont faim ; qui cherche le Seigneur ne manquera d’aucun bien. »

Quelques exemples vécus vaudront mieux qu’un long discours.

Le 1er janvier 2023, au Togo, le père de Koroko est décédé, et un mois plus tard, son oncle est mort à son tour. C’est alors que la famille a commencé à faire pression afin que Koroko achète un bélier pour un sacrifice, dans le but de prier pour les âmes des deux défunts ». Il refusa. Alors, raconte-t-il, « Ils ont exigé que je leur donne de l'argent pour permettre aux autres d'acheter le bélier, et ils ont menacé de me forcer à participer à toute la cérémonie.» Mais Koroko est resté ferme dans sa foi et ses convictions, « sans compromis, quoi qu'il arrive.» Il explique : « Ma vie sans Jésus n'a pas de sens. Christ est ma seule raison de vivre aujourd'hui. Toute la Parole de Dieu m'interdit de pratiquer le spiritisme. Jésus-Christ est mon sacrifice parfait et je n'ai pas besoin d'autres sacrifices. Loin de moi l'idée de négliger le merveilleux sacrifice de mon Sauveur et Seigneur pour des sacrifices occultes !», conclut Koroko [5].

« Venez, mes fils, écoutez-moi, que je vous enseigne la crainte du Seigneur. Qui donc aime la vie et désire les jours où il verra le bonheur ? Garde ta langue du mal et tes lèvres des paroles perfides. Évite le mal, fais ce qui est bien, poursuis la paix, recherche-la.»

La paix qu’il faut rechercher n’est pas la compromission, ce n’est pas une paix toujours tranquille, c’est une paix profonde, une plénitude qui vient de l’union à Dieu. Voici un exemple. Les chrétiens d'un village du Laos voulaient simplement vivre en paix avec le reste de la communauté, cherchant à aider leur prochain et à travailler ensemble pour le bien de tous. Ce sont huit familles et environ 30 personnes au total qui servent Dieu dans leur communauté depuis 2020. Mais en janvier 2024, le chef du village a réuni tous les villageois et a lancé un ultimatum aux chrétiens : « Il a menacé de leur interdire d’entrer dans le village s’ils ne renonçaient pas à l'Évangile ». La plupart des habitants de ce village pratiquent l’animisme. Ceux qui choisissent de suivre Jésus sont considérés comme rejetant leur héritage ethnique et sont, à leur tour, rejetés par la communauté. Ce type de rejet peut être brutal pour les personnes qui dépendent de l’agriculture. Les chrétiens ont déclaré : « Nous ne pouvons pas revenir à l’animisme. Nous continuerons à croire en Jésus-Christ. Nous pouvons vivre dans la même communauté tout en étant capables de nous entraider. »

Le problème a finalement été remonté au niveau du district. Et un compromis a été trouvé : Les villageois ont permis aux chrétiens de vivre dans le village, mais pas dans la zone communautaire, les chrétiens ont reçu l’ordre de déplacer leur maison en dehors des limites du village. Som un témoin, dit : «Nous remercions le Seigneur pour le succès de la réunion. C’est un soulagement que les chrétiens puissent vivre dans leur village d’origine, même si c’est à l’extérieur. Que le Seigneur bénisse les villageois, et qu’ils apportent la paix à la communauté. S’il vous plaît, priez pour que ces chrétiens soient sel et lumière pour leur propre communauté afin qu’ils puissent proclamer la parole de Dieu aux non-croyants !» Les nouvelles maisons construites avec de l'aide extérieure [6].

« Évite le mal, fais ce qui est bien, poursuis la paix, recherche-la ».

Voici un dernier exemple : dans la nuit du 3 mai 2023, de violents affrontements interethniques et religieux ont éclaté dans l'État du Manipur en Inde. Des chrétiens ont été pris pour cible et ont été sommés de se reconvertir à l'hindouisme. Des groupes extrémistes ont vandalisé les bâtiments de l'église, ils ont rassemblé tous les meubles, les instruments de musique et le matériel de sonorisation et ont tout incendié. Mais la violence n'était pas encore terminée. Les foules ont bientôt tourné leur attention vers les maisons des chrétiens. Mais Ajay dit : « Dieu nous a protégés. Ces gens peuvent brûler nos bâtiments, mais ils ne pourront jamais détruire le peuple de Dieu ! » [7].

Celui qui adore Dieu se sent en sécurité, parce qu’il touche l’éternité. Celui qui adore Dieu, même s’il est dans une situation difficile, perçoit le poids de la gloire divine, et, en comparaison, toutes ses difficultés présentes sont légères, presque inconsistante devant ce qui a un poids d’éternité. « Saints du Seigneur, adorez-le : rien ne manque à ceux qui le craignent. »

Deuxième lecture (Ep 5, 15-20)

Frères, prenez bien garde à votre conduite : ne vivez pas comme des fous, mais comme des sages. Tirez parti du temps présent, car nous traversons des jours mauvais. Ne soyez donc pas insensés, mais comprenez bien quelle est la volonté du Seigneur.

Ne vous enivrez pas de vin, car il porte à l’inconduite ; soyez plutôt remplis de l’Esprit Saint. Dites entre vous des psaumes, des hymnes et des chants inspirés, chantez le Seigneur et célébrez-le de tout votre cœur. À tout moment et pour toutes choses, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, rendez grâce à Dieu le Père. – Parole du Seigneur.

Saint Paul nous invite à être sages, et non pas insensés, littéralement déficients de reᶜyānā pensée, sentiment, conscience, raisonnement, volonté, délibération, intelligence.

On devient déficient de raisonnement si on n’apprend plus à faire de démonstration logique, on devient déficient de délibération si on se contente d’un chatbot d’intelligence artificielle. On devient déficient de sentiment si on n’apprend pas à faire attention aux autres, à ce qu’ils ressentent. Dieu nous a équipés pour comprendre ce que les autres ressentent, on parle de « neurones miroirs ». Nos décisions ne sont pas au bout d’une statistique. Il faut apprendre à raisonner, à délibérer, à jauger, à goûter, à apprécier… Il y a une intelligence relationnelle. Il y a une intelligence spirituelle. Comme il est important de former les jeunes générations !

Prenons l’exemple de l’eugénisme.

Saint Paul nous invite à être sages, et dans la Bible, il y a un livre qui s’appelle le livre de la Sagesse, on lit au chapitre 3 : « Même si leur vie se prolonge, ils seront comptés pour rien et, à la fin, leur vieillesse sera sans honneur, s'ils meurent tôt, ils n'auront pas d'espérance ni de consolation au jour de la Décision, car la fin d'une race injuste est cruelle ! » (Sg 3, 17-19)

L’important n’est donc pas d’être une race sélectionnée avec une génétique améliorée pour une longévité maximum, l’important, nous dit le livre de la Sagesse, c’est de ne pas être injuste.

Depuis l’Antiquité, les hommes cherchent à améliorer la race humaine.
Et plusieurs solutions ont été mises en oeuvre.

Avant le Christ, Platon disait : « Il faut que ce soit l’élite des hommes qui ait commerce avec l’élite des femmes, et, au contraire, le rebut avec le rebut ; que les rejetons des premiers soient élevés, non ceux des seconds, si l’on veut que le troupeau garde sa qualité éminente » (Platon, La République, tiré des Œuvres complètes, texte traduit par Chambry, Société d’édition Les Belles Lettres , 1949, t. VII, 1ère partie, p. 65, V, 459, d,e).

Et Aristote considérait que le nombre d’habitants devait être stable, faute de quoi les cités seraient ingouvernables : « La liberté de procréation, à la façon dont elle existe dans la plupart des États, est une cause infaillible de misère pour les citoyens, et la misère engendre les séditions et la criminalité. Phidon de Corinthe, l’un des plus anciens législateurs, était d’avis que le nombre des familles et des citoyens devait rester immutable » (Aristote, La Politique, traduction par Tricot, Librairie philosophique J. Vrin, 1982, pp. 110-111, livre II, c. 6, 1265 a 37 et 1265 b 6-15). En réalité, la mise en œuvre de ces principes a posé des problèmes de dépopulation.

La Bible et le Nouveau Testament libère la procréation des contraintes liées à l’utilité sociale. L’être humain est beaucoup plus que les services qu’il peut rendre à la société.

Mais quand le christianisme fut rejeté, on voit réapparaître les erreurs anciennes.

L’eugénisme quantitatif a été promu en 1798 quand le pasteur protestant Malthus (1766-1834) qui publie son célèbre Essais sur le principe de population. Cet ouvrage marque la véritable naissance des préoccupations modernes de régulation des populations. Il existera désormais un courant nommé malthusianisme puis néo-malthusianisme, qui cherche avant tout la diminution ou la stabilisation des populations, et que l’on peut appeler eugénisme quantitatif. Pour Malthus, il est « dans la nature des choses que les riches ne puissent aider indéfiniment les pauvres » ; ceux-ci n’ont « aucun droit à être entretenus aux frais de la société ». C’est le refus d’accepter la parole du Seigneur : « vous aurez toujours des pauvres parmi vous (Jn 12, 8) ».

L’eugénisme qualitatif vient des découvertes de la génétique. Charles Darwin (1809-1882) dans l’Origine des espèces, paru en 1860, voit dans l’hérédité et dans la lutte pour la vie, le moyen pour les plus aptes de se perpétuer aux dépens des inaptes. Cette conception porte en germe une société moderne où la sélection joue un rôle majeur, et où l’on cautionne l’élimination des inaptes. C’est à l’anglais Francis Galton (1822-1891), cousin de Charles Darwin, que l’on doit la création du terme Eugénique ou Art de bien engendrer. Dès 1869 il publie Le Génie héréditaire. Son but est de créer des individus plus intelligents et meilleurs. Il imagine que la moralité suit automatiquement « l’intelligence », mais plus un être mauvais est intelligent, et plus il peut faire de mal. L’eugénisme est alors comme une religion puisqu’elle prétend améliorer l’humanité, mais elle fait abstraction du bien et du mal.

L’eugénisme prive l’humanité des ressources que ses sélectionneurs n’ont pas sur quantifier. Il manque de sagesse, il est déficient de conscience. Saint Paul nous invite à être sages ḥakkīme, et non pas insensés, littéralement déficients de « reᶜyānā » pensée, sentiment, conscience, raisonnement, volonté, délibération, intelligence.

Pour l’apôtre Paul, la vie morale ne peut se comprendre que comme une réponse généreuse à l’amour et au don de Dieu. Celui-ci, en effet, voulant faire de nous ses enfants, a envoyé dans le monde son propre Fils et dans nos coeurs l’Esprit de son Fils qui crie : Abba, Père (Ga 4,6 ; cf. Ep 1,3-14), pour que nous ne soyons plus prisonniers du péché mais que nous marchions «selon l’Esprit » « Soyez plutôt remplis de l’Esprit Saint. Dites entre vous des psaumes, des hymnes et des chants inspirés, chantez le Seigneur et célébrez-le de tout votre cœur. À tout moment et pour toutes choses, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, rendez grâce à Dieu le Père ». Les croyants sont invités à rendre grâce constamment. Si Paul les invite à vivre une vie digne de leur appel, il le fait toujours en leur mettant devant les yeux l’immense don que Dieu leur a fait. La vie morale, en effet, ne trouve son sens plein et véritable que si elle est vécue comme une offrande de soi-même pour répondre au don de Dieu (Rm 12,1).

Eh bien, il y a de grands justes, de grands saints, parmi les pauvres, et il y a des petits, des faibles ou des handicapés remplis de l’Esprit Saint, qui célèbrent le Seigneur d’une manière sublime. Pourquoi priver Dieu d’une telle louange !?

Évangile (Jn 6, 51-58)

En ce temps-là, Jésus disait à la foule :

51 Je suis le Pain Vivant, / qui suis descendu depuis les Cieux,
et si quelqu’un mange de ce pain-ci, / il vivra pour toujours !

Et le pain que, moi, je donnerai, / c’est mon corps,
qu’en faveur de la vie du monde, / je donne.

52 Or les Juifs disputaient les uns avec les autres, / en disant :
‘Comment peut-il, celui-ci, / nous donner son corps à manger ?     

53 Et Jésus leur dit :

‘Amen, amen, / [je] vous le dis :
Si vous ne mangez le corps / du Fils de l’homme / et ne buvez son sang,

V
ous n’avez pas la vie / en vous-mêmes !

54 Or celui qui mange mon corps, / et boit mon sang,
il a la vie / qui est pour toujours [la vie de l'éternité] ! 

Et, moi, je le ressusciterai, / au dernier jour !

55 Mon corps, en effet, / est véritablement un aliment ;
et mon sang / est véritablement une boisson !

56 Celui qui mange mon corps / et boit mon sang,
demeure en moi / et moi en lui ! 

57 Comme le Père, le vivant, m’a envoyé, / et que je vis par le Père,
ainsi celui qui me mangera / vivra par moi !’

58 Voici le pain / qui est descendu des Cieux !
Ce n’est pas comme celui que mangèrent vos pères, / la manne, et ils moururent !

59 Celui qui mange de ce pain-ci, / vivra pour toujours !’

– Acclamons la Parole de Dieu.

 

Apprenons un mot de syriaque ou araméen.
« Si vous ne mangez le corps / du Fils de l’homme / et ne buvez son sang,
vous n’avez pas la vie / en vous-mêmes ! » (Jn 6, 53)

« En vous-même », en syriaque ou en araméen, la Pshitta (Bible London society et la Bible de Mossoul) donne dans votre « qnūmā », dans l’être profond ; « qnūmā » est un mot que les dictionnaires peinent à définir, les versions grecques ou latines disent simplement « en vous ».

Les Occidentaux n’ont pas les mêmes concepts que les Orientaux.

Tous ont l’idée d’une nature : la nature humaine commune à tous les êtres humains, et la nature divine commune aux personnes divines.

La notion latine de « personne » aurait aussi son équivalent au sens de personne visible, le personnage avec son visage et ses gestes, aussi, ce serait le mot grec « prosôpon » décalqué en araméen par « parṣopā ».

Mais l’araméen a aussi le mot « qnūmā » qui représente quelque chose d’invisible et qui signifie la manière personnelle de faire vivre la nature, il donne l’adverbe « personnellement », l’expression « en son nom propre ».

Ainsi, Jésus a deux natures, la nature divine et la nature humaine. Il a une manière personnelle d’être divin, c’est d’être Fils de Dieu, et il a manière personnelle d’être humain, c’est d’être le Messie fils de David, il a donc deux « qnūmé ». Les deux qnūmé de Jésus sont invisibles, dans son être profond, et les gens ne voient qu’un personnage avec son visage et ses gestes, Jésus n’a qu’un « parṣopā ».

Ouvrons une parenthèse : quand Nestorius doit se faire comprendre en grec, il ne dispose pas d’une traduction du mot « qnūmā », en conséquence sa pensée, incomprise, fut rejetée en l’an 431. Finalement, et heureusement, l’Église catholique et l’Église assyrienne d’Orient ont fait une déclaration christologique commune le 11 novembre 1994.

Ainsi, nous avons chacun un être profond, un « qnūmā », une manière personnelle et unique d’être un être humain. Et l’Eucharistie va nourrir cette dimension, la plus personnelle, de notre être :

« Si vous ne mangez le corps / du Fils de l’homme / et ne buvez son sang,
vous n’avez pas la vie / en vous-mêmes ! [
dans votre « qnūmā » !] » (Jn 6, 53)

Deuxièmement, il nous faut passer du monde dominé par la mort, la mort étant entrée dans le monde par l’envie du diable (Sg 2, 24), à la « vivification » que l’Occident a traduit par le mot « salut ». En araméen, le mot « ḥayye’ » signifie la vie au sens fort. Dans l’expression : « Je suis / le Pain de Vie ! » (Jn 6, 48), le mot « vie » n’a pas été traduit par « salut » mais cela aurait été possible dans la ligne habituelle des traducteurs. Recevoir le corps du Fils de l’homme fait passer dans la Vie, parce qu’il nous communique l’intention de faire la volonté du Père (Jn 6, 38), volonté créatrice et vivifiante.

« Amen, amen, / [je] vous le dis :
Si vous ne mangez le corps / du Fils de l’homme / et ne buvez son sang,

[Ce verset est ternaire : manger / Fils de l’homme / boire]

vous n’avez pas la vie / en vous-mêmes ! » (Jn 6, 53)

« Le corps [pagrā] ». Lorsque saint Paul dit que l’Église est un corps dont le Christ est la tête (Col 1, 18), il reprend une image sociologique connue à son époque : l’Empire est un corps dont César est la tête et donc chaque membre a besoin des autres. Mais il nous faut revenir au sens premier. Le mot araméen traduit par « corps » désigne le corps vivant ou mort (Mt 6, 25 ; 19, 6 ; 24, 28 ; 26, 26). « Qui mange mon corps, et boit mon sang » est donc une expression choquante. Elle l’est cependant moins du fait que Jésus se présente comme le Fils de l’homme en se référant au Fils de l’homme que Daniel voit venir sur les nuées du Ciel et qui siège au tribunal céleste pour juger les nations (Dn 7, 9-14). À travers un tel jugement, qui sera accompli à la Parousie (le retour glorieux du Christ), le monde entier sera vivifié He 9, 28, avant l’ultime passage dans l’éternelle vie.

Toute idée d’anthropophagie est ainsi exclue, à supposer qu’elle soit venue à l’esprit d’un auditeur de l’époque. Le disciple découvre progressivement que Jésus est l’envoyé du Père : il a, en quelque sorte dès avant l’incarnation, un corps dans la pensée divine, un corps qui sera incarné et avec lequel il souffre sa Passion, puis qui sera glorifié dans sa résurrection, n’étant plus soumis au monde, et qui pourra se rendre mystérieusement présent partout où l’Eucharistie est célébrée.

« Or celui qui mange mon corps, / et boit mon sang,
il a la vie / qui est pour toujours ! [On peut aussi traduire : « la vie éternelle ! » ou «  la vie de l’éternité ! »]

Et, moi, je le remettrai debout [je le ressusciterai], / au dernier jour ! » (Jn 6, 54).

Les premiers rituels du viatique (l’ordo 49) nous sont rapportés ainsi : « Dès que tu le verras approcher de la mort, il doit être communié avec le Saint Sacrifice, même s’il a mangé ce même jour, parce que la communion sera pour lui défenseur et aide pour la résurrection des justes. Car c’est elle qui le ressuscitera. Après que la communion a été reçue, les Passions du Seigneur doivent être lues devant le corps du malade par des prêtres ou par des diacres jusqu’à ce que l’âme sorte du corps »[8]. Et en l’an 325, le concile de Nicée (Canon 13) précise que même ceux qui ont apostasié lors des persécutions doivent pouvoir bénéficier de la miséricorde de Dieu et communier dans leur mort à la Pâque du Christ : « Si quelqu’un accomplit son exode, [c’est-à-dire est en train de mourir] qu’il ne soit pas privé du dernier et très nécessaire viatique [c’est-à-dire l’Eucharistie] » (DS 129).

 

[1] Ayant pris une forte conscience de son identité baptismale, il prit en 1702 un nom se référant au lieu de son baptême : « Louis-Marie de Montfort », et abandonna progressivement dans ses signatures le nom de famille Grignon.

[2] Cf. Louis Le CROM, Un apôtre marial, saint Louis-Marie Grignion de Montfort, édition les traditions françaises, Tourcoing 1946, p. 449-450

[3] Les actions de la Sagesse biblique, vêtir et nourrir ses amis, sont attribuées à Marie qui procure des habits doublés qui sont « les habits de Jésus et les siens propres », c’est à dire les mérites de Jésus et les siens (VD 205), et le pain qui est Jésus.

[4] Dans la Septante il n’y a pas la mention d’un ordre divin comme c’est le cas dans la Vulgate. La Septante dit simplement : « Je me suis enracinée chez un peuple plein de gloire, dans le domaine du Seigneur, en son patrimoine. » (Sirac 24,12).

[5] https://www.portesouvertes.fr/edifier/temoignages/togo-la-bible-m-interdit-le-spiritisme

[6] https://www.portesouvertes.fr/edifier/temoignages/laos-huit-familles-enfin-en-paix

[7] https://www.portesouvertes.fr/edifier/temoignages/inde-l-espoir-au-coeur-de-la-violence

[8] A.G. MARTIMORT, L’Église en prière, T. II, R. Cabié, Desclée, Paris, 1983, p. 242

Date de dernière mise à jour : 24/07/2024