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21e dimanche ordinaire B
Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.
Evangile Jn 6, 60-69 (118.96 Ko)
Podcast sur : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#
Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30).
Première lecture (Jos 24, 1-2a.15-17.18b)
Psaume (Ps 33 (34), 2-3, 16-17, 20-21, 22-23)
Deuxième lecture (Ep 5, 21-32)
Première lecture (Jos 24, 1-2a.15-17.18b)
En ces jours-là, Josué réunit toutes les tribus d’Israël à Sichem ; puis il appela les anciens d’Israël, avec les chefs, les juges et les scribes ; ils se présentèrent devant Dieu. Josué dit alors à tout le peuple : « S’il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir : les dieux que vos pères servaient au-delà de l’Euphrate, ou les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. Moi et les miens, nous voulons servir le Seigneur. » Le peuple répondit : « Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux ! C’est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d’Égypte, cette maison d’esclavage ; c’est lui qui, sous nos yeux, a accompli tous ces signes et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcouru, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés. Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu. » – Parole du Seigneur.
La lecture de ce dimanche nous parle d’une Alliance. L’alliance est un engagement réciproque, elle peut être remplie de faiblesse du côté de l’homme, mais du côté de Dieu elle est forte et fidèle. Josué demande : « S’il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir ». Cette question s’adresse aussi à nous, qui sommes sollicités pour servir telle ou telle juste cause, plus ou moins juste, avec parfois des gestes de type religieux comme le fait de mettre un genou au sol.
Les douze tribus choisissent de servir le Seigneur qui les a fait sortir de la maison d’esclavage ; pas de poing levé, pas de tumulte, les douze tribus savent que le Seigneur Dieu agit puissamment et qu’il a un projet de vie, et que son projet réussira parfaitement.
Les douze tribus pouvaient avoir des raisons de se soulever contre les rois cananéens, comme, de nos jours, nous pouvons avoir des raisons de créer un tumulte, mais la violence provoque de nouvelles injustices, et lever le poing pour défendre des opprimés, c’est bien souvent se prétendre soi-même innocent alors qu’on ne l’est pas, puis s’arroger le droit de juger le monde et d’exterminer par la parole ou par les actes ceux qui ne sont pas de notre opinion. En servant le Seigneur, on remet à Dieu le jugement, car lui veut que tous les hommes soient sauvés, et il a en vue la vie éternelle, la vie de l’éternité. C’est pourquoi le psaume de ce jour, paradoxalement, est la véritable source de douceur et de non-violence : « Le Seigneur regarde les justes, il écoute, attentif à leurs cris. Le Seigneur affronte les méchants pour effacer de la terre leur mémoire. » (Ps 33 (34), 16-17). Ce n’est pas aux les hommes à faire le jugement, car Dieu le fera.
À Sichem, l’Alliance est conclue en faisant mémoire des hauts-faits de Dieu. Le peuple dit : « Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux ! C’est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d’Égypte, cette maison d’esclavage ; c’est lui qui, sous nos yeux, a accompli tous ces signes et nous a protégés tout le long du chemin que nous avons parcouru, chez tous les peuples au milieu desquels nous sommes passés. Nous aussi, nous voulons servir le Seigneur, car c’est lui notre Dieu. »
Cette Alliance d’un peuple entier avec le Seigneur Dieu peut surprendre nos mentalités laïques. En France, depuis Hugues Capet les fleurs de lys (d’or) représentent la souveraineté divine, mais on a ensuite choisit la souveraineté nationale sans la souveraineté divine. On craignait que la royauté puisse être une dictature. De fait, si Dieu exigeait une soumission, alors la référence à Dieu ouvre la porte à un régime autoritaire, disons une certaine dictature. Mais si Dieu fait de nous des fils, dans une Alliance qui nous élève au rang de partenaire d’Alliance, alors la référence à Dieu n’ouvre pas la porte à la dictature, au contraire.
Complétons notre commentaire en expliquant l’étape historique que représente cette Alliance à Sichem. La violence bien connue du livre de Josué, avec ces villes entièrement exterminées, reflète la théologie de Josias, au septième siècle avant J-C, qui voudra fermement éliminer toute trace d’idolâtrie et de rite cananéen. Or, les destructions de villes dont parle le livre de Josué n’ont jamais été réalisées par les Hébreux, qui n’ont jamais fait de conquête militaire de Canaan. Les ruines de ces villes ont servi de décor à l’enseignement du livre de Josué, mais ce ne sont pas les Hébreux qui les ont ruinés. En effet, leur déclin a une cause bien connue que la Bible ne raconte pas : l’affrontement entre l’Empire hittite et l’Empire égyptien. Canaan avait en effet de riches cités-État pendant le deuxième millénaire avant J-C. Ces cités ont connu un déclin brutal ou des destructions massives entre -1250 et -1150. La population fut alors si réduite que le roi de Jérusalem demanda au pharaon 50 hommes pour protéger le pays, tandis que le roi de Meggido en demanda 100 [1]. Les villes de Haçor, Aphek, Lakish et Megiddo n’ont pas été vaincues par les troupes de Josué : l’archéologie démontre que la destruction de ces quatre villes s’est déroulée à plus d’un siècle d’intervalle alors qu’il n’y avait pas sur les hautes terres de villes fortifiées (les Hébreux n’étaient pas une force militaire, conquérante). Ensuite, ces cités connurent une renaissance au Xe siècle (entre -1000 et -900), c’est une nouvelle Canaan, celle que connut la dynastie d’Omri. [2]
Une seconde remarque concerne le rassemblement de toutes les tribus d’Israël à Sichem. L’observation des listes différentes de tribus et de fils de Jacob nous fait poser l’hypothèse d’un processus de généalogisation des tribus. Comparer : Gn 29–30 et Gn 41,51 et Gn 48, Gn 50,23… Alors, si nous avons la même foi, nous disons que nous avons les mêmes ancêtres. Les tribus ont mis en commun leurs expériences de sortie d’Égypte, ou l’expérience analogue de prise de distance des mythes Cananéens grâce à la résistance de Déborah (Jg 5), et cette mise en commun est l’occasion d’une prise de conscience, d’un éclaircissement de la foi. Il est important de réaliser qu’il y a un événement qui s’ajoute à celui de l’Exode proprement dit, c’est l’événement de la rencontre des tribus d’origines différentes (esclaves d’Égypte ; semi-nomade d’au-delà du Jourdain ; paysans en Canaan autour de Déborah.) Leur échange, leur partage d’expérience, est un événement probablement au moins aussi important que le premier dans le jaillissement de la foi. L’Esprit Saint rassemble ces tribus. Ce qui unit ces tribus, c’est une même révélation, dans l’histoire. Ce rassemblement fait que l’on racontera les événements fondateurs de la même manière, en insistant sur le passage dans l’eau, l’eau de la mer Rouge, ou mer des roseaux [3] ou l’eau du Qishôn pour Déborah (Jg 5). Ainsi, les tribus vont se dire frères, avec les mêmes ancêtres, Jacob, fils d’Abraham.
Psaume (Ps 33 (34), 2-3, 16-17, 20-21, 22-23)
Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres. Je me glorifierai dans le Seigneur : que les pauvres m’entendent et soient en fête ! Le Seigneur regarde les justes, il écoute, attentif à leurs cris. Le Seigneur affronte les méchants pour effacer de la terre leur mémoire. Malheur sur malheur pour le juste, mais le Seigneur chaque fois le délivre. Il veille sur chacun de ses os : pas un ne sera brisé. Le mal tuera les méchants [l’impie] ; ils seront châtiés d’avoir haï le juste. Le Seigneur rachètera ses serviteurs : pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge.
« Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sans cesse à mes lèvres. » Le Créateur est un bon berger, il donna à l’humanité de quoi se nourrir et se fortifier. Mais un jour les hommes se révoltèrent et sont devenus des esclaves sans espoir, et certains étaient utilisés dans des rituels, offerts à d’autres divinités. Mais le Seigneur n’oublia pas ses créatures et envoya son propre Fils… Dans la première Alliance déjà, le fidèle bénit le Seigneur. Il le loue ! Combien plus dans la nouvelle Alliance, quand, par amour pour nous, Jésus offre son corps en sacrifice vivant, le Pain de Vie pour tous les hommes. Son sang est le breuvage des anges du Ciel offert avec amour aux hommes.
« Je me glorifierai dans le Seigneur ». Dans la première Alliance déjà, le fidèle se glorifie dans le Seigneur, il perçoit que le poids de son existence est en Dieu. C’est vrai, sans le Seigneur, notre vie n’a pas de poids, avec le Seigneur, notre existence, aimée du Créateur, prend un poids immense, nos journées, offertes au Seigneur, prennent un poids de gloire. « Que les pauvres m’entendent et soient en fête ! » Et les pauvres sont les premiers parce que les pauvres n’ont pas l’illusion de la gloire des richesses matérielles, qui n’est pas réellement une gloire.
« Le Seigneur regarde les justes, il écoute, attentif à leurs cris ». Le livre de l’Apocalypse constitue un accomplissement de ce psaume. Il est dit en effet que les martyrs crient, l’Apocalypse dit qu’ils sont sous l’autel, en effet, dans les églises, les autels contiennent les reliques des martyrs, et ils crient « jusques à quand ? » (Ap 6, 10). Et le Seigneur les écoute. Il va répondre. Sa réponse, c’est l’apparition du Fils de l’homme, le retour glorieux du Christ, qui n’est pas la Fin du monde, mais je jugement des impies.
« Le Seigneur affronte les méchants pour effacer de la terre leur mémoire. » (Ps 34, 17). Au temps de l’Ancien Testament, le psalmiste attend du Seigneur de pouvoir vivre en paix, délivré des méchants. Mais cette attente ne sera pleinement réalisée qu’au moment de la Venue en gloire de Notre Seigneur ! « Au moment de la moisson je dirai aux moissonneurs : ‘Ramassez d’abord l’ivraie et liez-la en bottes que l’on fera brûler ; quant au blé, recueillez-le dans mon grenier » (Mt 13, 30). « Alors, laissant les foules, il vint à la maison ; et ses disciples s'approchant lui dirent : Explique-nous la parabole de l'ivraie dans le champ » (Mt 13, 36) « Le Fils de l'homme enverra ses anges, qui ramasseront de son Royaume tous les scandales et tous les fauteurs d'iniquité, et les jetteront dans la fournaise ardente : là seront les pleurs et les grincements de dents » (Mt 13, 41-42). L’ivraie sera arrachée par les anges au moment de la Venue en gloire de Notre Seigneur ! Mais il n’appartient pas aux chrétiens de juger les hommes. Il ne nous appartient pas d’exterminer les partis, les groupes, les individus.
L’évangile de Matthieu parle aussi de l’apparition du signe du Fils de l’homme. En Mt 24, 30, la mention du « signe du Fils de l’homme » est propre à l’évangile de saint Matthieu. Or, nous n’avons pas le mot « āṯā, signe », qui est très fréquent, mais le mot « nīšā », unique dans les évangiles, et qui désigne une enseigne, un étendard, un signe, un symbole, on peut penser par exemple à l’apparition de la croix dans le ciel, mais ce mot signifie aussi le but, le dessein, le projet : en voyant le Christ ressuscité, les gens comprendront le but pour lequel ils ont été créés, et le dessein glorieux du Créateur. Ce mot « nīšā » signifie aussi la manière, la règle, le mode musical, le poème. Autrement dit, les gens percevront la manière de vivre à laquelle ils sont appelés, le mode musical, c’est-à-dire le genre d’harmonie, c’est aussi une révélation esthétique, la beauté de la volonté divine va apparaître désirable. Ce mot signifie enfin : « argument » : l’apparition du Christ dans la gloire aura quelque chose de convainquant.
« Malheur sur malheur pour le juste, mais le Seigneur chaque fois le délivre. Il veille sur chacun de ses os : pas un ne sera brisé. » (Ps 34, 21). Ce verset s’accomplit au moment de la mort de Jésus :
« 31 Or les Juifs, parce que c’était la Parascève, / disaient :
‘Que ne passent pas la nuit ces corps sur leurs croix !’ / parce que le Shabbat pointait.
En effet, c’était un grand jour / le jour de ce shabbat-là !
Et ils demandèrent / à Pilate,
que soient brisées leurs jambes, à ces crucifiés, / et qu’ils les fassent descendre.
32 Et des soldats vinrent / et brisèrent les jambes du premier,
et de cet autre / qui avait été crucifié avec lui.
33 Et étant venus / auprès de Jésus,
ils virent qu’il était déjà mort / et ne brisèrent pas ses jambes.
34 Mais un des soldats / frappa son côté par une lance
et, aussitôt, il sortit du sang / et de l’eau.
35 Et celui qui a vu a témoigné, / et son témoignage est véridique ;
et lui sait / qu’il a dit la vérité,
afin que vous aussi / vous croyiez.
36 Ces choses-là / furent en effet,
afin que s’accomplissent l’Écriture qui dit : / ‘Pas un os ne sera brisé en lui’ ;
37 et aussi cette autre Écriture qui dit : / ‘Ils regarderont celui qu’ils ont transpercé.’ » (Jn 19, 31-37 traduit de l’araméen ou syriaque)
« Le mal tuera les méchants [en hébreu : l’impie] ; ils seront châtiés d’avoir haï le juste » (Ps 34, 22). Cela correspond, dans l’Apocalypse au fait que la bête va elle-même détruire Babylone, cette ville symbolique qui est décrite comme une prostituée avide du sang des martyrs. La bête représente une mafia corrompue qui a reçu son pouvoir de Satan, et elle détruit elle-même son œuvre (Ap 17, 16-17). Autrement dit, le mal tuera les méchants !
« Le Seigneur rachètera ses serviteurs : pas de châtiment pour qui trouve en lui son refuge ». Ce verset nous persuade d’aimer le Seigneur et de ne pas avoir peur, car il n'y a pas de peur dans l'amour. Ont peur ceux qui n'aiment pas, car ils attendent les châtiments et parce qu'ils savent combien ils sont vides et durs. Marchons dans la confiance envers le Seigneur, vers le Père, le cher Père, vers Jésus. Accueillons Jésus dans nos vies, recevons-le, et nous recevons l’amour qui est aussi la vie de l’éternité. L’Apocalypse nous promet pareillement que ceux qui gardent les commandements de Dieu et possèdent le témoignage de Jésus (Ap 12, 17), entreront dans la Jérusalem nouvelle. Leur refuge est en Dieu. Ils n’auront pas de châtiments, leurs petites fautes, les fautes involontaires, seront lavées et pardonnées. « Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure avec eux ; ils seront son peuple, et lui, Dieu-avec-eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux » (Ap 21, 2-4). Alors prions humblement : Seigneur, montrez-nous comment suivre vos Lois, et comment faire votre volonté. Depuis le début de l’histoire d’Alliance, rappelons-nous par exemple l’Alliance à Sichem avec Josué, le Seigneur nous a fait un grand don, soyons reconnaissants, et que notre vie soit digne de notre Dieu.
Deuxième lecture (Ep 5, 21-32)
Frères, par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ; les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus ; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien ! puisque l’Église se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari. Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle, afin de la rendre sainte en la purifiant par le bain de l’eau baptismale, accompagné d’une parole ; il voulait se la présenter à lui-même, cette Église, resplendissante, sans tache, ni ride, ni rien de tel ; il la voulait sainte et immaculée. C’est de la même façon que les maris doivent aimer leur femme : comme leur propre corps. Celui qui aime sa femme s’aime soi-même. Jamais personne n’a méprisé son propre corps : au contraire, on le nourrit, on en prend soin. C’est ce que fait le Christ pour l’Église, parce que nous sommes les membres de son corps. Comme dit l’Écriture : À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église. – Parole du Seigneur.
L'Écriture Sainte s'ouvre sur la création de l'homme et de la femme à l'image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26-27) et s'achève sur la vision des "noces de l'Agneau" (Ap 19, 7 ; 19, 9). La lecture que nous avons entendue évoque l'Alliance nouvelle du Christ et de l'Église. L’Église est unie au Christ comme à son Époux (cf. Ep 5, 25-27), L'apôtre présente l'Église et chaque fidèle, comme une Épouse "fiancée" au Christ Seigneur, pour n'être avec Lui qu'un seul Esprit (cf. 1Co 6,15-16). Elle est l'Épouse immaculée de l'Agneau immaculé (cf. Ap 22,17 ; Ep 1,4 1,5,27) que le Christ "a aimée, pour laquelle il s'est livré afin de la sanctifier" (Ep 5, 26) » (CEC 796). « En venant rétablir l'ordre initial de la création perturbé par le péché, il donne lui-même la force et la grâce pour vivre le mariage dans la dimension nouvelle du Règne de Dieu. C'est en suivant le Christ, en renonçant à eux-mêmes, en prenant leurs croix sur eux (cf. Mc 8,34) que les époux pourront "comprendre" (cf. Mt 19,11) le sens originel du mariage et le vivre avec l'aide du Christ. Cette grâce du Mariage chrétien est un fruit de la Croix du Christ, source de toute vie chrétienne. » (CEC 1615)
« C'est ce que l'Apôtre Paul fait saisir en disant : "Maris, aimez vos femmes, comme le Christ a aimé l'Église ; il s'est livré pour elle, afin de la sanctifier" (Ep 5, 25-26), en ajoutant aussitôt : "'Voici donc que l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux ne feront qu'une seule chair' : ce mystère est de grande portée ; je veux dire qu'il s'applique au Christ et à l'Église" (Ep 5,31-32) ». (CEC 1616). Il s’agit en famille de « se pardonner mutuellement, de porter les uns les fardeaux des autres (cf. Ga 6,2), d'être "soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ" (Ep 5,21) et de s'aimer d'un amour surnaturel, délicat et fécond. Dans les joies de leur amour et de leur vie familiale le Seigneur leur donne, dès ici-bas, un avant-goût du festin des noces de l'Agneau » (CEC 1642).
Un couple qui se marie échange, en présence du prêtre, des engagements solennels et libres, dans des conditions de parfaite égalité ; le contrat matrimonial est conclu entre personnes jouissant de droits strictement égaux et fonde une famille. Or, toute famille est une société, et toute société a un chef, et toute autorité vient de Dieu. Saint Paul nous dit que la famille a aussi son autorité, le père de famille, afin que la vie familiale s’épanouisse dans la sérénité et la joie. Saint Augustin disait : « Au foyer du chrétien, qui vit de la foi et se sait pèlerin en marche vers la cité céleste, ceux-là même qui commandent sont les serviteurs de ceux à qui ils paraissent commander ; ils commandent non pour dominer, mais pour conseiller, non par orgueil qui veut prévaloir, mais par la bonté qui veut pourvoir » (La Cité de Dieu 1. XIX, c. 14.)
Et Pie XII disait aux pères de famille : « N'hésitez donc point à exercer cette autorité ; ne vous soustrayez point à ces devoirs, ne fuyez point ces responsabilités. La barre de la nef domestique a été confiée à vos mains : que l'indolence, l'insouciance, l’égoïsme et les passe-temps ne vous fassent pas abandonner ce poste. Mais, envers la femme que vous avez choisie pour compagne de votre vie, quelle délicatesse, quel respect, quelle affection votre autorité ne devra-t-elle pas témoigner et pratiquer en toutes circonstances, joyeuses ou tristes ! » Et il ajouta : « Suivez l'exemple de saint Joseph. Il contemplait devant lui la Très Sainte Vierge, meilleure, plus sainte, plus élevée que lui ; un souverain respect lui faisait vénérer en elle la Reine des anges et des hommes, la mère de son Dieu ; et pourtant, il restait à son poste de chef de famille et ne négligeait aucune des obligations que lui imposait ce titre. » (Pie XII, Discours aux jeunes époux (1941).
Effectivement, l’évangile nous montre qu’après la visite des mages à Bethléem, c’est Joseph que l’ange avertit de fuir en Égypte, et c’est encore lui qu’il avertit de revenir, non pas à Bethléem, mais à Nazareth. Vers 1670, en Pologne, un homme, souffrant beaucoup d'une dure maladie, s'adressa à saint Joseph, Patron de la bonne mort. La nuit suivante, un homme âgé vint chez lui et il reconnut saint Joseph. Celui-ci dit au malade : « Tu guériras quand tu feras peindre ce tableau de la sainte Famille avec une inscription "Allez à Joseph" et tu l'offriras à l'église collégiale de Kalisz (alors dédiée à l'Assomption). » La forme du tableau est celle d'une maison. Sur une ligne verticale, Dieu le Père, le Saint Esprit, Jésus : la Sainte Trinité dans le mouvement de l'Incarnation. Sur une ligne horizontale : Marie, Jésus, Joseph : la sainte Famille en marche, et Joseph ouvre la marche.
L’enfant Jésus est très lumineux, et son auréole semble se lever à l'horizon comme le soleil levant. Debout sur une minuscule montagne, il tient fermement la main (l'index) de Joseph comme pour se laisser guider dans son entrée dans la vie humaine et sociale.
Marie aussi tient la main de Jésus. Curieusement, elle est enceinte parce qu'elle est la mère du disciple (Jn 19, 25-27), de chacun de nous, la mère de l'Église.
Joseph est particulièrement éclairé sur le front (l'intelligence, la sagesse) et sur le pied droit (la marche juste). Par cette lumière et par le fait qu'il ouvre la marche, Joseph est dépeint ainsi comme le berger du Rédempteur, et comme le patron de l'Église, il en est le protecteur et le guide, jusqu'à ce que toute l'humanité soit retournée dans la maison du Père céleste.
[En ce temps-là, Jésus avait donné un enseignement dans la synagogue de Capharnaüm.]
60 Et beaucoup de ses disciples, qui les entendirent, / disaient :
‘Cette parole-ci est dure ! / Qui est capable de l’entendre ?’
61 Or Jésus sut en lui-même / que ses disciples murmuraient contre celle-ci ;
et il leur dit :
‘Cela vous fait trébucher ?’
62 Si vous voyez, alors, le Fils de l’homme qui monte… / là où il était auparavant[4] ?
63 C’est l’Esprit qui vivifie / le corps ne sert de rien.
Les paroles que je vous ai dites / sont Esprit et sont Vie !
64 Mais il y en a parmi vous / qui ne croient pas.’
Jésus savait en effet / depuis le début [5]
qui étaient ceux qui ne croiraient pas / et qui était celui qui le livrerait.
65 Et il leur disait :
‘C’est pourquoi / je vous ai dit :
Personne n’est capable de venir auprès de moi, / si cela ne lui a été donné de la part de mon Père !’
66 À cause de cette parole,
beaucoup de ses disciples se retirèrent / et ils ne marchaient plus avec lui.
67 Et Jésus dit à ses Douze :
‘Est-ce que, vous aussi, / vous voulez vous en aller ?’
68 Simon Pierre répondit / et dit : ‘Mon Seigneur ! / Auprès de qui irions-nous ?
Tu as... / les paroles de la vie éternelle !
69 Et, nous, / nous avons cru et reconnu
que c’est toi le Messie / le Fils du Dieu Vivant !’ » (ma traduction depuis l’araméen)
Dans un récitatif, le verbe croire (v. 64. 69) se mime par le geste de s’appuyer sur quelque chose de solide, on pose les mains sur un appui de fenêtre, ou sur un rocher, un autel en pierre, etc.
« C’est l’Esprit qui vivifie » (Jn 6, 63), je vais ici prolonger la méditation sur la seconde lecture où nous avons évoqué saint Joseph. « Dans les paroles de l'annonciation nocturne, non seulement Joseph entend la vérité divine sur la vocation ineffable de son épouse, mais il y ré-entend aussi la vérité sur sa propre vocation. Cet homme juste, qui, dans l'esprit des plus nobles traditions du peuple élu, aimait la Vierge de Nazareth et s'était lié à elle d'un amour sponsal, est à nouveau appelé par Dieu à cet amour. «Joseph fit ce que l'Ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse» (Mt 1, 24) ; ce qui est engendré en elle «vient de l'Esprit-Saint» : ne faut-il pas conclure, devant ces expressions, que son amour d'homme est, lui aussi, régénéré par l'Esprit-Saint ? Ne faut-il pas penser que l'amour de Dieu, qui a été répandu dans le coeur de l'homme par le Saint-Esprit Rm 5,5, façonne de la manière la plus parfaite tout amour humain ? Il façonne aussi - et d'une façon tout à fait singulière - l'amour sponsal des époux, et il approfondit en lui tout ce qui est humainement digne et beau, ce qui porte les signes de l'abandon exclusif de soi, de l'alliance des personnes et de la communion authentique du Mystère trinitaire.» (Jean Paul II, Lettre apostolique Redemptoris Custos 19)
« Cette parole-ci est dure ! / Qui est capable de l’entendre ? » (Jn 6, 60). En araméen, l’adjectif qašyā signifie : dure, solide, mais aussi difficile, audacieuse, violente. Pour l’apôtre Pierre, qui veut suivre Jésus, c’est une parole solide, une vérité sur laquelle on peut s’appuyer et construire sa vie. Et cette solidité est préférable à la vanité du mensonge ou de l'adulation. Cependant, d’autres se sentent menacés par cette parole qui devient une pierre d’achoppement, ils croient que cette parole est difficile, aussi ne tardent-ils pas à la rejeter et à s'en aller. OrAu désert, Moïse fit jaillir l’eau du rocher. Et si la parole de Jésus est solide comme une pierre, elle se transforme en fontaine dans les coeurs des fidèles devenus tendres et humbles. Et ceux qui se retirent trop vite, auraient peut-être bu avec abondance aux fleuves d'eau vive…
J’explique dans mon livre « Jean, l’évangile en filet », Parole et Silence 2020, que le Pain de Vie nous met en contact (en araméen « qūrbānā ») avec « le Fils de l’homme [remonté] au lieu où il existait auparavant » (Jn 6, 62), ce qui est bien sûr mystérieux : l’expression « les Saints Mystères » est heureuse. Le discours de Jésus à Capharnaüm concerne aussi « le sang » du Fils de l’homme qu’il faut « boire » (Jn 6, 53). Les auditeurs ne pensent pas à une sorte d’anthropophagie, Jésus leur a précisé que c’est « l’Esprit qui vivifie » (Jn 6, 63), pourtant ils sont nombreux à partir (Jn 6, 66). C’est ici qu’il faut se souvenir du récit de la Création : « Dieu dit : Faisons l’homme [« Adam » de la racine « dam », le sang] à notre image, comme notre ressemblance [du verbe « damah », ressembler, être consanguin] » (Gn 1, 26). Les Saints Mystères établissent un contact qui réalise cette ressemblance, c’est la réalisation du sens le plus profond du qūrbānā dedeeded. Pierre le pressent et s’écrie : « Mon Seigneur ! Auprès de qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ! (La vie de l’éternité] » (Jn 6, 68).
« Personne n’est capable de venir auprès de moi, / si cela ne lui a été donné de la part de mon Père !’» (Jn 6, 65). Ce verset est éclairé dans la perspective du qūrbānā chrétien. C’est le Père qui donne à chacun l’étreinte du Christ-Epoux. Le qūrbānā n’est pas une expérience identique pour chacun et à chaque liturgie, la rencontre avec Jésus est unique à chaque eucharistie. Elle dépend du dessein du Père qui voit les dispositions de chacun, sa volonté d’être fidèle à la volonté divine ; ce qui convient pour son progrès.
Lors des journées mondiales de la jeunesse de l’an 2000, Jean-Paul II fit un commentaire de cet évangile en disant : « Célébrer l'Eucharistie ‘en mangeant sa chair et en buvant son sang’ signifie accepter la logique de la croix et du service. Cela signifie donc témoigner de sa propre disponibilité à se sacrifier pour les autres, comme il l'a fait lui-même. Notre société a un immense besoin de ce témoignage, les jeunes en ont besoin plus que jamais, eux qui sont souvent tentés par les mirages d'une vie facile et confortable, par la drogue et l'hédonisme, pour se trouver ensuite dans la spirale du désespoir, du non-sens, de la violence. Il est urgent de changer de route en direction du Christ, qui est aussi la direction de la justice, de la solidarité, de l'engagement pour une société et un avenir dignes de l'homme. Telle est notre Eucharistie, telle est la réponse que le Christ attend de nous, de vous, les jeunes, en conclusion de votre Jubilé. Jésus n'aime pas les demi-mesures, et il n'hésite pas à nous bousculer avec sa question : ‘Voulez-vous partir, vous aussi ?’ Avec Pierre, devant le Christ, Pain de vie, nous aussi, aujourd'hui, nous voulons redire : ‘Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle’ (Jn 6,68) » (Jean-Paul II, 2000 Journées Mondiales Jeunesse 15)
Enfin, le verset « Tu as / les paroles de la vie éternelle ! » (Jn 6,68) suggère quelques réflexions concernant la catéchèse. « Il se peut que tel langage se révèle préférable pour transmettre ce contenu à telle personne ou à tel groupe de personnes. Un choix sera valable dans la mesure où […] il sera inspiré par l'humble souci de mieux rejoindre un contenu qui doit demeurer intact. La méthode et le langage utilisés doivent rester vraiment des instruments pour communiquer la totalité et non une partie des "paroles de vie éternelle" (Jn 6, 68) » (Jean-Paul II, Catechesi Tradendae § 31)
[1] Nous savons ces choses par les découvertes sur le site archéologique d’Amarna en Egypte (l’antique Akhetaton) où furent notamment retrouvées des tablettes d’argile remontant au XIV° siècle avant J-C et qui sont des lettres échangées par les rois d’Égypte avec les grandes cours étrangères de l’époque : Babylone, l’Assyrie, les Hittites, Alashiya (Chypre)...
[2] Cf. I. FINKELSTEIN et N. SILBERMAN, La Bible dévoilée, Gallimard, Paris 2006 (première édition 2002)
[3] Exode 10,19 ; 13,18 ; 15,4; 15,22; 23,31 Josué 2,10 ; 4,23 ; 24,6
[4] men qḏīm
[5] men qḏīm : la rime avec le verset 62 aide la mémorisation.
Date de dernière mise à jour : 01/08/2024