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24e dimanche ordinaire (B)
Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.
Evangile Mc 8, 27-35 (128.35 Ko)
Podcast sur : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#
Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30).
Première lecture (Is 50, 5-9a)
Psaume (Ps 114 (116 A), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9) – N-D des 7 douleurs
Deuxième lecture (Jc 2, 14-18)
Première lecture (Is 50, 5-9a)
Le Seigneur mon Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas caché ma face devant les outrages et les crachats. Le Seigneur mon Dieu vient à mon secours ; c’est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, c’est pourquoi j’ai rendu ma face dure comme pierre : je sais que je ne serai pas confondu. Il est proche, Celui qui me justifie. Quelqu’un veut-il plaider contre moi ? Comparaissons ensemble ! Quelqu’un veut-il m’attaquer en justice ? Qu’il s’avance vers moi ! Voilà le Seigneur mon Dieu, il prend ma défense ; qui donc me condamnera ? – Parole du Seigneur.
Quelle magnanimité chez cet homme, quelle foi en Dieu, surtout…
Cette lecture fait partie de ce qu’on a coutume d’appeler les chants du Serviteur, (cf. Is 42,1-9 cf. Mt 12,18-21 et Jn 1,32-34, puis Is 49,1-6 cf. Mt 3,17 et Lc 2,32, enfin Is 50,4-10 et Is 52,13-53,12), datés de l’exil à Babylone.
Le peuple juif semblait bien « frappé par Dieu et humilié » (Is 53, 4). Et pourtant, « par lui, la volonté de YHWH s’accomplira » (Is 53, 10), c’est-à-dire que s’accomplira la révélation que Dieu n’est pas abstrait et que nous sommes ses fils.
Cette explication fait sens, mais elle ne tient pas compte de l’ensemble du texte biblique. En effet, les foules des nations et les rois sont devant le Serviteur : « les rois resteront bouche close » (Is 52, 15). Le Serviteur justifie ces foules de nations, porte leur péché et intercède pour eux. Les compatriotes du serviteur reconnaissent que la souffrance du serviteur est rédemptrice pour eux : « Il a porté nos infirmités, il s’est chargé de nos maladies... dans ses blessures nous sommes guéris. » (Is 53,4-5). La souffrance du serviteur est rédemptrice pour tous les peuples : « Par sa connaissance, le juste, mon serviteur, justifiera les multitudes en s’accablant lui-même de leurs fautes » (Is 53,11). La souffrance et la mort du Serviteur ont un sens dans le dessein de Dieu. Elles vont obtenir le pardon des pécheurs qui n’avaient pas pu jusque-là être libérés du poids de leurs fautes. Ce plan de salut n’est pas imposé de façon déterministe, mais sa réalisation dépend de la libre acceptation par le Serviteur : « S’il offre sa vie… » (Isaïe 53,10).
Sans exclure un sens collectif, il est difficilement pensable que le Serviteur soit simplement le groupe qui rentre d’exil.
L’expression « avec les puissants il partagera le butin » (Is 53, 12) évoque une figure historique, très proche des combats politiques et territoriaux... mais du fait qu’il est "juste" (Isaïe 53, 11), le "Serviteur" ne peut être :
Ni Cyrus qui ne connaît pas Dieu et qui n’est qu’un rapace (Is 45-46),
Ni Sheshbaççar critiqué pour avoir entrepris la construction des murailles et n’avoir pas compris que Dieu voulait en Jérusalem une ville ouverte (Za 2,8),
Ni Zorobabel, critiqué pour avoir négligé la reconstruction du temple (Ag 1,1-4),
Ni Josué ayant dû être purifié pour ses péchés (Za 3,1-5),
Ni le reste d’Israël qui confesse ses fautes en réponse à la prédication du Serviteur (Isaïe 53, 8)…
En dépassant les personnages qui l’ont précédé, le Serviteur souffrant apparaît tellement grand et saint, qu’il devient une figure messianique, mais d’une manière si discrète que Jésus surprendra encore.
« Ces chants annoncent le sens de la Passion de Jésus, et indiquent ainsi la manière dont Il répandra l’Esprit Saint pour vivifier la multitude : non pas de l’extérieur, mais en épousant notre "condition d’esclave" (Ph 2,7). Prenant sur lui notre mort, il peut nous communiquer son propre Esprit de vie ». (CEC 713)
Saint Irénée de Lyon, vers l’an 200, explique :
« 33. Le Seigneur est venu chercher la brebis perdue, c’est-à-dire l’homme qui s’était égaré. Ce pourquoi il ne s’est fait créature que par celle-là même qui était issue de la race d’ADAM, et il en a gardé toute la ressemblance. En effet, il était nécessaire qu’ADAM fût récapitulé dans le Christ afin que ce qui est mortel fût englouti par l’immortalité, qu’EVE fût restaurée en MARIE, afin qu’une Vierge devenant l’avocate d’une vierge, la désobéissance de l’une fût détruite par l’obéissance de l’autre.
34. Et ce péché auquel le bois avait donné naissance a été effacé par le bois de l’obéissance, sur lequel a été cloué le Fils de l’homme, obéissant à Dieu ; ainsi, en abolissant la science du mal, il a introduit et distribué la science du bien. Et comme le mal est de désobéir à Dieu, obéir à Dieu est le bien. Voilà pourquoi le Verbe parle par la bouche du prophète ISAÏE, en révélant d’avance ce qui doit s’accomplir - puisque être prophète, c’est annoncer l’avenir. Or, le Verbe, par ce moyen, parle en ces termes : "Je ne refuserai pas et ne contredirai pas. J’ai présenté mon dos aux coups et mes joues aux soufflets, et je n’ai pas soustrait mon visage à d’ignominieux crachats" (Is 50, 6). Or, par l’obéissance qu’il a pratiquée jusqu’à la mort en étant attaché sur le bois, il a expié l’antique désobéissance provoquée par le bois.
Verbe tout-puissant de Dieu, sa présence invisible s’étend à la création entière et en soutient la longueur, la largeur, la hauteur et la profondeur : tout est gouverné par le Verbe de Dieu. Il a été crucifié, lui le Fils de Dieu, en ces quatre dimensions, lui dont l’univers portait déjà l’empreinte cruciforme. S’étant rendu visible, il devait nécessairement manifester de manière sensible, sur la croix, son action invisible. Car c’est lui qui illumine les hauteurs, c’est-à-dire les cieux, qui scrute les profondeurs de la terre ; il parcourt l’étendue de l’Orient à l’Occident, il atteint l’immense espace du Nord au Midi, et appelle à la connaissance de son Père les hommes partout dispersés. » (St Irénée de Lyon, La prédication des apôtres et ses preuves, § 33-34).
Et un peu plus loin : « 88. C’est encore d’ISAIE que nous apprenons qu’après son ascension, le Christ devait être exalté au-dessus de tout, et que personne ne pourra jamais lui être comparé, témoin ces paroles : "Quel est celui qui est jugé ? Qu’il se lève contre moi. Et quel est celui qui est justifié ? Qu’il s’approche du Fils du Seigneur. Malheur à vous ! Car tous vous vous userez comme un vêtement et la teigne vous dévorera ... Et toute chair sera abaissée et le Seigneur seul sera exalté dans les hauteurs". Is 50,8; 2,17. Qu’à la fin, ceux qui auront servi Dieu seront sauvés par son nom voilà ce que dit encore ISAIE : "Et à mes serviteurs il sera donné un nom nouveau, qui sera béni sur la terre et ils béniront le Dieu de vérité". Is 65,15 Lui-même en personne réalisera cette bénédiction et nous sauvera par son sang, c’est ce qu’ISAIE annonce: "Ce n’est ni un intercesseur, ni un ange, mais le Seigneur lui-même qui les a sauvés, parce qu’il les aime et prend soin d’eux ; c’est lui-même qui les a délivrés" Is 63,9 » (St Irénée de Lyon, La prédication des apôtres et ses preuves, § 88).
Psaume (Ps 114 (116 A), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9) – N-D des 7 douleurs
J’aime le Seigneur : il entend le cri de ma prière ; il incline vers moi son oreille : toute ma vie, je l’invoquerai. J’étais pris dans les filets de la mort, retenu dans les liens de l’abîme, j’éprouvais la tristesse et l’angoisse ; j’ai invoqué le nom du Seigneur : « Seigneur, je t’en prie, délivre-moi ! » Le Seigneur est justice et pitié, notre Dieu est tendresse. Le Seigneur défend les petits : j’étais faible, il m’a sauvé. Il a sauvé mon âme de la mort, gardé mes yeux des larmes et mes pieds du faux pas. Je marcherai en présence du Seigneur sur la terre des vivants.
Je vous propose de prier ce psaume en union avec la Vierge Marie, qui, auprès de la croix de son fils, éprouvait, comme dit le psaume, la tristesse et l’angoisse. Elle est restée ferme dans la foi jusqu’à la résurrection et elle a accompagné les premiers pas des apôtres.
L’attention vers la mère du Seigneur dans le mystère de sa douleur est très ancienne (en Orient, dès l’époque patristique avec saint Éphrem et Romanos le Mélode. En Occident, avec les bénédictins de Cluny, saint Anselme, les cisterciens, les franciscains, les servites de Marie...), mais elle est entrée tardivement dans la liturgie. L’archevêque de Cologne propage la messe de la douleur de Marie en 1423. Les Servites de Marie, en 1668, obtinrent de célébrer les Sept Douleurs de la Vierge le dimanche suivant l’exaltation de la sainte Croix. Cette fête a été étendue à l’Église universelle en 1814. En 1913, Pie X l’a établie - par respect du dimanche – à la date du 15 septembre (le rite ambrosien célébrait déjà ce jour-là les Sept Douleurs comme octave de la Nativité de Marie).
Mémoire facultative, les lectures actuelles du 15 septembre reprennent les lectures du Vendredi saint. On peut méditer :
- Marie auprès de la croix est la « nouvelle Ève » (auprès du Christ nouvel Adam).
- Marie n’est pas morte comme martyre, mais elle en a connu la souffrance, elle est « Reine des martyrs ».
- La croix est pour Marie l’heure de l’enfantement.
- L’heure de la "transfictio" du cœur de la Vierge, l’épée annoncée par Siméon.
- La compassion de la mère envers le Fils, et, en deuxième lieu, les fidèles compatissent avec Marie. La pietà. Marie recevant le corps de son Christ descendu de la croix.
- Les larmes de Marie.
- La solitude de Marie.
Vatican II nous parle de la présence de Marie au calvaire en ces termes : « ... Jusqu’à la croix où, non sans un dessein divin, elle était debout (cf. Jn 19, 25), souffrant cruellement avec son Fils unique, associée d’un cœur maternel à son sacrifice, donnant à l’immolation de la victime, née de sa chair, le consentement de son amour, pour être enfin, par le même Christ Jésus mourant sur la croix, donnée comme sa Mère au disciple par ces mots : "Femme, voici ton Fils" (cf. Jn 19, 26-27) » (Vatican II, Constitution dogmatique Lumen gentium 58).
La souffrance peut écraser l’homme, le détruire. Or Marie est restée debout, elle a retourné la souffrance en une offrande, en un acte d’amour : Marie « était debout » non seulement physiquement, mais dans sa foi au Fils de Dieu qui mourait.
Le concile précise qu’elle était « associée d’un cœur maternel à son sacrifice ». Marie participe aussi à l’intention de son Fils, à son intention oblative.
Il faut noter enfin que rien n’advient sans une obéissance au dessein divin. Aucune coopération au salut ne peut être offerte sans que le Père ne le veuille et le demande.
Marie consent « avec amour », ce qui est stupéfiant. Ce que Marie aime, c’est notre salut. dededed C’est la foi qui coopère au salut, et la foi agit par la charité.
Une dizaine d’années avant les terribles événements qui ont déstabilisé la région, à Kibého au Rwanda, le 2 mars 1982, Marie Claire Mukangango reçoit la demande de la Vierge que l’on prie le chapelet des sept douleurs avec quelques spécificités :
On commence par cette prière : « Mon Dieu, je t’offre ce Chapelet des Sept Douleurs pour ta sainte gloire et pour honorer ta Sainte Mère en méditant et en partageant sa douleur avec Elle. Je t’en supplie, donne-moi de regretter les péchés que j’ai commis, aide-moi à être doux et humble comme je le dois, afin de pouvoir obtenir toutes les indulgences qu’il contient. »
Marie demande ensuite de prononcer les paroles de l’acte de contrition pour nos péchés devant Dieu : « Seigneur, j’ai le regret de tous les péchés que j’ai commis contre Toi, car ils me jettent dans le désaccord avec Toi et ils me séparent de Toi alors que Tu me tiens en vie et que Tu viens à mon secours infiniment ; et je les regrette infiniment car ce sont eux qui ont fait tuer Jésus-Christ, ton Fils que tu aimes. Père, sauve-moi d’eux, je ne veux pas les répéter, je veux être à Toi, Amen. »
On récite ensuite trois fois le « Je vous salue Marie » et la supplication « Mère de Miséricorde, rappelez-nous tous les jours la Passion de Jésus. »
La douleur de Marie est annoncée, on récite un Notre Père, sept fois le « Je vous salue Marie » et ensuite la supplication : « Mère de Miséricorde, rappelez-nous tous les jours la Passion de Jésus. »
- Le vieillard Siméon annonce à Marie que son Fils sera en butte à la contradiction. (Lc 2,25-35)
- Le massacre à Bethléem et la fuite en Égypte, la souffrance de l’exil. (Mt 2, 13-15)
- La disparition de Jésus à douze ans. (Lc 2, 41-52)
- Marie voit son Fils chargé de la croix. (Lc 23, 27)
- Marie debout au pied de la Croix. (Jn 19, 25-27)
- Marie reçoit le corps inanimé de son Fils. (Jn 19, 38-40)
- Marie au tombeau de Jésus. (Jn 19,41-42)
Après la septième douleur, on récite la prière de conclusion : « Reine de Martyrs, ton âme a été éprouvée dans un océan de douleurs ; je t’en supplie, en souvenir des larmes que Tu as versées pendant ce mystère, daigne m’obtenir et à tous les pécheurs une entière contrition »
Et trois fois : « Cœur profondément douloureux et Immaculé de la Vierge Marie, priez pour nous qui avons recours à vous ».
Deuxième lecture (Jc 2, 14-18)
Mes frères, si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, à quoi cela sert-il ? Sa foi peut-elle le sauver ? Supposons qu’un frère ou une sœur n’ait pas de quoi s’habiller, ni de quoi manger tous les jours ; si l’un de vous leur dit : « Allez en paix ! Mettez-vous au chaud, et mangez à votre faim ! » sans leur donner le nécessaire pour vivre, à quoi cela sert-il ? Ainsi donc, la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte. En revanche, on va dire : « Toi, tu as la foi ; moi, j’ai les œuvres. Montre-moi donc ta foi sans les œuvres ; moi, c’est par mes œuvres que je te montrerai la foi. » – Parole du Seigneur.
Chers auditeurs, le verbe sauver est ici en araméen le verbe « faire vivre, vivifier », de sorte que nous entendons en araméen un contraste entre la vie et la mort : « Si quelqu’un prétend avoir la foi, sans la mettre en œuvre, à quoi cela sert-il ? Sa foi peut-elle le sauver [vivifier] ? » (v. 14) et « la foi, si elle n’est pas mise en œuvre, est bel et bien morte » (v. 17). De quelle vie s’agit-il ? Il s’agit de la vie divine, comme lorsque Dieu modela l’homme et « insuffla dans ses narines une haleine de vie » (Gn 2, 7). L’humanité est créée avec l’haleine de Dieu qui est un Dieu vivant, créateur, actif, et nous sommes appelés à être actifs à notre tour, vivant de son dynamisme.
Les œuvres humaines tirent leur bonté de leur participation à la vie divine, hors de laquelle la nature humaine est dénaturée. C’est pourquoi la foi, en tant qu’elle est une relation au Dieu vivant, est toujours au fondement et à la racine de toute œuvre bonne. Nous avons tous à l’oreille ces paroles de Jésus à la pécheresse en larmes : « Ta foi t’a sauvée [vivifiée] ; / va en paix ! » (Lc 7, 50) ou encore, au lépreux purifié : « Lève-toi, va ; / ta foi t’a sauvé [vivifié] ! » (Lc 17, 19). Le concile de Trente dit très clairement : « Lorsque l’Apôtre dit que l’homme est "justifié par la foi et gratuitement +Rm 3,22-24, il faut comprendre ces mots dans le sens où l’a toujours et unanimement tenu et exprimé l’Eglise catholique, à savoir que si nous sommes dits être justifiés par la foi, c’est parce que "la foi est le commencement du salut de l’homme", le fondement et la racine de toute justification, que sans elle "il est impossible de plaire à Dieu" +He 11,6 et de parvenir à partager le sort de ses enfants 2P 1,4 ; et nous sommes dits être justifiés gratuitement parce que rien de ce qui précède la justification, que ce soit la foi ou les oeuvres, ne mérite cette grâce de la justification. En effet "Si c’est une grâce, elle ne vient pas des oeuvres ; autrement (comme le dit le même Apôtre) la grâce n’est plus la grâce" Rm 11,6 » (chapitre 8 du décret sur la justification du concile de Trente, donné le 13 janvier 1547, DS 1532)
Les œuvres s’entendent soit pour une attitude générale conforme aux commandements divins, soit pour des actes particuliers, et il y a des œuvres matérielles et d’autres qui sont spirituelles.
Ainsi, Jésus ressuscité parle donc de la grâce du baptême que des commandements à mettre en pratique.
« 19 Allez, / donc
faites des disciples de toutes les nations / et baptisez-les
au nom du Père / et du Fils / et de l’Esprit Saint [l’Esprit de Sainteté] [1].
20 Et enseignez-leur à garder / tout ce que je vous ai commandé. » (Mt 28, 19-20)
Et le concile de Trente insiste : « 19. Si quelqu’un dit que rien n’est commandé dans l’Evangile en dehors de la foi, que les autres choses sont indifférentes, ni commandées, ni défendues, mais libres, ou que les dix commandements ne concernent pas les chrétiens : qu’il soit anathème.
20. Si quelqu’un dit que l’homme justifié, aussi parfait qu’il soit, n’est pas tenu d’observer les commandements de Dieu et de l’Église, mais seulement de croire, comme si l’Evangile était une pure et simple promesse de la vie éternelle sans la condition d’observer les commandements : qu’il soit anathème.
21. Si quelqu’un dit que le Christ Jésus a été donné par Dieu aux hommes comme rédempteur, en qui se confier, et non pas aussi comme législateur à qui obéir : qu’il soit anathème ». (Canons sur la justification).
Saint Jacques écrit : « Montre-moi donc ta foi sans les œuvres ; moi, c’est par mes œuvres que je te montrerai la foi. » (Jc 2, 18).
Jésus parle des œuvres matérielles en parlant du jugement des nations : « Alors ceux-ci lui demanderont à leur tour : Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé ou assoiffé, étranger ou nu, malade ou prisonnier, et de ne te point secourir ? Alors il leur répondra : En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait. Et ils s’en iront, ceux-ci à une peine éternelle, et les justes à une vie éternelle. » (Mt 25, 44-46)
Les œuvres spirituelles consistent à enseigner, à appeler à la conversion, Jésus prévient : « Le mercenaire, qui n’est pas le pasteur et à qui n’appartiennent pas les brebis, voit-il venir le loup, il laisse les brebis et s’enfuit, et le loup s’en empare et les disperse » (Jn 10, 12). Jésus, lui, est « le bon berger » et il dit : « Les oeuvres que je fais au nom de mon Père témoignent de moi » (Jn 10, 25).
Dans la pratique, œuvres matérielles et œuvres spirituelles sont liées : la troisième lettre de saint Jean félicite Gaïus : « Moi, l’Ancien, au très cher Gaïus, que j’aime en vérité. […] Très cher, tu agis fidèlement en te dépensant pour les frères, bien que ce soient des étrangers. Ils ont rendu témoignage à ta charité, devant l’Église. Tu feras une bonne action en pourvoyant à leur voyage, d’une manière digne de Dieu. C’est pour le Nom qu’ils se sont mis en route, sans rien recevoir des païens. Nous devons accueillir de tels hommes, afin de collaborer à leurs travaux pour la Vérité ». (3Jn 1, 1-8).
Quant à l’Apocalypse, elle est un filet d’oralité, et l’on peut méditer ensemble, par exemple, la lettre à la 4e Eglise, le 4e sceau, la 4e trompette, jusqu’à la 4e conclusion[2]… La quatrième Église est confrontée à des gens qui prétendent atteindre les profondeurs de Satan, les gnostiques prétendent toujours atteindre « les profondeurs » (Cf. Saint IRÉNÉE, Contre les hérésies II, 37, 6 et 38,1), et ils s’affranchissent de la justice des œuvres. De ce fait, ils ont une prédilection pour une autorité invisible, distincte de l’exercice public d’un pouvoir visible qui doit rendre des comptes. À cela, hier comme aujourd’hui, répond l’Apocalypse de saint Jean. A la quatrième Église, il est dit : « Au vainqueur et gardien de mes œuvres, je donnerai autorité sur les peuples ». Celui qui obéit aux commandements de Dieu ne peut pas être accusé de corruption, et son autorité est respectée. Le Christ est présenté comme Fils de Dieu (Ap 2, 18), l’Esprit de Jésus, est un Esprit filial. La « bête » que les gnostiques vénèreront, sera jetée dans l’étang de feu au moment de l’apparition du Christ dans la gloire, le monde sera alors purifié de leur influence délétère. « Bienheureux ceux qui font ses commandements : leur autorité sera sur le bois de la Vie ! Et, par la Porte, ils entreront dans la Cité ! » (Ap 22, 14 – 4e conclusion).
Évangile (Mc 8, 27-35)
Dans une traduction pour être apprise par cœur, comme les apôtres, à partir de leur langue (l’araméen), et j’encourage les éducateurs à proposer aux enfants et aux jeunes cette expérience, qui leur permettra à la fois une intériorisation du texte et leur fournira un excellent moyen d’évangéliser.
« 27 Jésus sortit avec ses disciples / vers les campagnes de Césarée de Philippe.
et il les interrogeait en chemin, / en leur disant :
Qui disent-ils à mon sujet, les hommes, / que je suis ?
28 Or eux, ils dirent : / Jean le baptiste,
d’autres : / Élie,
et d’autres : / l’un des prophètes.
29 Jésus leur dit :
Or, vous, qui dites-vous, à mon sujet, / que je suis ?
Simon Pierre répondit / et lui dit :
Tu es le Messie, / le Fils du Dieu vivant ! [3]
30 Et il les mit en garde / qu’à personne, ils ne disent [cela] de lui.
31 Et il commençait à leur enseigner, / que le Fils de l’homme allait souffrir beaucoup
et qu’il serait banni de la part des anciens, / et de la part des grands prêtres,
et de la part des scribes, / et serait tué ;
et, le troisième jour, / il se relèverait debout.
32 Et c’était ouvertement [l’œil dans la Révélation] / qu’il parlait ce langage.
Et Pierre le mena [à part], / et commença à le mettre en garde…
33 Or lui, il tourna son visage, / et fixa son regard sur ses disciples ;
et il mit en garde Simon, / et dit :
‘Va-t-en derrière moi, / Satan !
Car tu ne penses pas divinement / mais humainement.
34 Et Jésus appela les foules, avec ses disciples, / et leur dit :
Qui veut venir à ma suite, / qu’il se renie lui-même,
qu’il prenne sa croix, / et qu’il vienne à ma suite !
35 Quiconque en effet veut se vivifier / se fera mourir.
et qui se fait périr, à cause de moi et à cause de ma Bonne nouvelle, / se vivifie !»
On pouvait penser que Jésus était Jean-Baptiste, car ce dernier venait d’être tué et Jésus appelait, comme lui, à la repentance. On pouvait penser aussi que Jésus était Élie, car il lui ressemble par les œuvres : la résurrection de la fille de Jaïre (Mc 5) et les deux multiplications des pains (Mc 6 et Mc 8) peuvent évoquer Élie qui multiplia la farine de la jarre de la veuve de Sarepta, puis ressuscita son fils (1R 17). Les gens identifient donc Jésus à Jean-Baptiste, ou à Élie, ou à l’un des prophètes.
Pierre, quant à lui, comprend que Jésus est le Messie, c’est-à-dire celui qui répond à l’attente d’Israël et accomplit toutes les prophéties. Il comprend aussi qu’il est « Le Fils du Dieu vivant », une expression présente en syriaque et en copte ancien (sahidique [4]), mais absente du latin et du grec (Nestle-Aland et de la version liturgique byzantine), sauf certains rares manuscrits grecs.
Sans sortir de la foi monothéiste, Pierre a compris que Dieu étant le Dieu vivant, il peut y avoir en Dieu un Fils, et un Père. Même s’il ne sait pas comment, Pierre a perçu que Jésus appartient à la divinité, et qu’en Jésus la divinité est unie à l’humanité.
&
« 31 Et il commençait à leur enseigner, / que le Fils de l’homme allait souffrir beaucoup
et qu’il serait banni de la part des anciens, / et de la part des grands prêtres,
et de la part des scribes, / et serait tué ;
et, le troisième jour, / il se relèverait debout.
32 Et c’était ouvertement [l’œil dans la Révélation] / qu’il parlait ce langage. » (Mc 8, 27-32)
La traduction du verset 32 hésite : on peut traduire simplement par un adverbe : Jésus parle « ouvertement ». On peut aussi traduire d’une manière littérale : « l’œil dans la révélation » : Jésus parle en commentant les Écritures, par exemple les chants du Serviteur Souffrant, ou encore la prophétie de Daniel annonçant un Messie massacré (Dn 9, 26).
« Et Pierre le mena [5] [à part], / et commença à le mettre en garde… » (Mc 8, 32)
Et à son tour Jésus « le met en garde » en lui disant « va-t-en derrière moi, Satan » (Mc 8, 33) exactement comme en Mt 16, 23. L’évangile de Matthieu était un lectionnaire liturgique. J’ai montré dans un livre dédié que l’évangile de Marc contient le témoignage primitif que Pierre a donné avec Jean, c’est pourquoi une grande partie de l’évangile de Marc est antérieure à l’évangile de Matthieu, mais pas tout. Notamment, Marc 1, 12-13 ne fait que résumer le récit des tentations, il cite le début et la fin du récit de Matthieu, à la manière d’un sommaire. Sans reprendre le détail, qui est supposé connu par les auditeurs. Or Matthieu explique ce que furent les tentations du Christ : le « tentateur » voulut lui faire exercer sa puissance divine d’une manière autonome, ce qui aurait été dénaturer Jésus, car c’est en tant que Fils qu’il est le Messie, c’est en tant que Fils qu’il nous vivifie et nous rend la vie divine dans l’Esprit filial. Voici le récit de la troisième tentation :
« 8 L’Accusateur le conduisit encore / sur une très haute montagne,
lui fit voir tous les royaumes du monde / et leur gloire,
9 et lui dit :
‘Tous ceux-ci, je te les donne, / si tu tombes pour te prosterner devant moi.’
10 Alors Jésus lui dit : / ‘Va-t-en, Satan !
Il est écrit, / en effet :
‘Le SEIGNEUR ton Dieu tu adoreras, / et à lui seul tu rendras un culte’. » (Mt 4, 8-10)
Et c’est sans doute à cela que la parole de Jésus à Pierre fait référence. Pierre ne le sait pas, mais celui qui écoute l’évangile le sait.
« Va-t-en derrière moi, / Satan !
Car tu ne penses pas divinement / mais humainement. » (Mc 8, 33)
&
« Et Jésus appela les foules, avec ses disciples, / et leur dit :
Qui veut venir à ma suite, / qu’il se renie lui-même,
qu’il prenne sa croix, / et qu’il vienne à ma suite ! » (Mc 8, 34)
Nourris du pain du miracle (à la multiplication des pains), les disciples ont accepté de suivre Jésus marchant vers sa Passion, et Jésus annonce maintenant, à tous, que la vie chrétienne n’est possible qu’en portant « sa croix » derrière lui. La croix est une image d’une telle violence que nul ne peut avoir prononcé ce verset si ce n’est Jésus.
Pour recevoir le salut, il faut d’abord un mouvement intérieur, un acte de volonté : « Qui veut venir à ma suite » (Mc 8, 34). Jésus ajoute « qu’il se renie lui-même ! » (v. 34). Il s’agit d’une mort à soi-même, c’est-à-dire à la volonté propre, à cause de Jésus, c’est-à-dire pour s’unir à la volonté de Jésus qui est celle-là même du Créateur, du « Dieu vivant ! »
Et Jésus avertit : « 35 Quiconque en effet veut se vivifier / se fera mourir » (Mc 8, 35). La traduction hésite, car le mot âme est utilisé en araméen comme un pronom réfléchi. Jésus avertit qui celui qui veut se sauver soi-même, se vivifier soi-même par toute sorte de développement personnel, c’est « perdre son âme ou l’endommager : se fera mourir ». C’est déjà vrai au plan psychologique : l’égocentrique qui veut se sauver seul et se rendre justice perd sa vie, car la qualité et la chaleur de la communication lui échappent. C’est vrai aussi au plan spirituel.
Et Jésus promet : « et qui se fait périr, à cause de moi et à cause de ma Bonne nouvelle, / se vivifie ! » Il ne s’agit pas de ne pas se soigner, de se négliger ou de se faire du mal à soi-même, il s’agit de se sacrifier pour Jésus et pour son Evangile, c’est comme dans la parabole du trésor dans le champ ou de la perle précieuse : on vend tout, on lâche tout pour ce trésor.
[1] Mgr Alichoran préfère que l’on traduise « l’Esprit de sainteté », mais on peut traduire « l’Esprit Saint ».
[2] Cf. Françoise BREYNAERT, L’Apocalypse revisitée. Une composition orale en filet. Imprimatur. Parole et Silence, 2022.
[3] « Le Fils du Dieu vivant » est présent en syriaque et en copte ancien (sahidique), mais il est absent du latin et du grec (Nestle-Aland et de la version liturgique byzantine), sauf certains rares manuscrits grecs. Le copte bohairique a remplacé le sahidique dans la liturgie au XI° siècle.
[4] Le copte bohairique a remplacé le sahidique dans la liturgie au XI° siècle
[5] On retrouve ce verbe « mener [dbar] » dans le récit des tentations du Christ, en Mt 4, 1 au passif, et Mt 4, 5 à l’actif.
Date de dernière mise à jour : 24/08/2024