33e ordinaire B

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Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.

Evangile mc 13Evangile Mc 13 (81.41 Ko)

Podcast sur  : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#

Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30). 

Première lecture (Dn 12, 1-3)

Psaume (Ps 15 (16), 5.8, 9-10, 11)

Deuxième lecture (He 10, 11-14.18)

Évangile (Mc 13, 24-32)

Première lecture (Dn 12, 1-3)

En ce temps-là se lèvera Michel, le chef des anges, celui qui se tient auprès des fils de ton peuple. Car ce sera un temps de détresse comme il n’y en a jamais eu depuis que les nations existent, jusqu’à ce temps-ci. Mais en ce temps-ci, ton peuple sera délivré, tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre. Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte et la déchéance éternelles. Ceux qui ont l’intelligence resplendiront comme la splendeur du firmament, et ceux qui sont des maîtres de justice pour la multitude brilleront comme les étoiles pour toujours et à jamais. – Parole du Seigneur. 

Chers auditeurs, celui qui accorde à Daniel la révélation des chapitres 11 et 12 revient d’un combat où Michel l’aide à accomplir le dessein de Dieu (Dn 11, 1), ce qui signifie que l’histoire dépend d’un combat spirituel, angélique. La vision évoque un misérable qui s’empare du royaume par des intrigues et qui s’excite contre le roi du midi. Il s’agit d’un grec, Antiochus Épiphane, roi de Syrie, qui entreprit deux expavant de revenir vaincu, furieux contre "l’alliance sainte" (Israël), et d’abolir le sacrifice perpétuel (Dn 11, 31) et de poser l’abomination de la désolation (Dn 12, 11-12). On sait par ailleurs qu’à la tête d’une armée juive, Judas Maccabée libéra le Temple le 25e jour du 9e mois de l’an -165 (cf. 1 Mac. 4, 52-59). Cette victoire n’est qu’une préfiguration d’une victoire autrement plus importante, celle du Messie massacré quand il viendra mettre un terme au désolateur (Dn 9, 27), c’est-à-dire l’Antichrist.

Le chapitre 12 du livre de Daniel commence par ces mots : « En ce temps-là se lèvera Michel, le chef des anges » (Dn 12, 1), ensuite un ange demande à Daniel de serrer ces paroles dans un livre qui doit rester scellé (Dn 12, 4). Et c’est justement un livre scellé que l’Apocalypse commence par évoquer, avec Jésus qui en ouvre les sept sceaux (Ap 5, 1-7). Dès l’ouverture, résonne la prière du « Sanctus ! » (Ap 4, 8), c’est-à-dire la prière d’adoration des chérubins dans le Sanctuaire (Is 6, 3). Le vaste combat qui s’ensuit implique les anges. La présence de saint Michel, dont le nom signifie « Qui est comme Dieu ? » est implicite dans la question « qui peut tenir éditions successives vers l’Égypte, au Jour de sa colère ? » (Cf. Ap 6, 7 – 6e sceau), et dans la proclamation des vainqueurs : « le salut à notre Dieu ! » (Ap 7, 10 – 7e sceau). Saint Michel est explicitement mentionné en Ap 12, 7, c’est-à-dire dans la partie correspondante de ce que j’appelle le « noyau » de l’Apocalypse, et alors il combat Satan.

« Mais en ce temps-ci, ton peuple sera délivré, tous ceux qui se trouveront inscrits dans le Livre » (Dn 12, 1). Attention, pour nombre de musulmans, la Volonté d’Allah est pensée comme l’application d’un programme pré-écrit, à la manière d’un livre ou, dirait-on aujourd’hui, d’un programme d’ordinateur : tout est écrit, maktoub, on n’y peut rien. Certains savants musulmans voudraient bien parler comme les chrétiens, en associant les notions de libre arbitre humain et de Volonté omnisciente de Dieu. Mais ils se heurtent à plusieurs sourates du Coran qui affirment la prédestination, laquelle est l’un des principes de la croyance musulmane [1]. On ne peut accomplir que ce que Allah a écrit pour nous (Sourate Le repentir 9, 51). Un homme peut être (bien) guidé par Allah, mais aussi l’inverse : Allah peut également le dévier, et alors il se perd (Sourate Le mur d’A’raf 7, 178-179).

Le Créateur ne nous aimerait-il pas d’une manière beaucoup plus simple ? Jésus nous dit de « devenir fils (Ibn) de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes » (Mt 5, 45). Et saint Paul prend l’image du potier : Dieu comme un potier façonne les justes, mais supporte les mauvais (Rm 9, 21-23). Lorsque saint Paul dit que Dieu le Père « nous a prédestinés à être saints et immaculés en sa présence dans l’amour » (Eph 1, 4-5), il ne s’agit pas d’un déterminisme, simplement Dieu n’a pas créé sans but et pour l’absurde, il nous a créés pour la sainteté et l’amour.

« Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour la honte et la déchéance éternelles » (Dn 12, 2). L’Ancien Testament n’est pas homogène dans sa compréhension de l’Au-delà et contient, entre autres, une vision très sombre du « Shéol » : « Car, dans la mort, nul souvenir de toi : dans le shéol, qui te louerait ? » (Ps 6,6) mais dans la foi des Maccabées « Mieux vaut mourir de la main des hommes en tenant de Dieu l’espoir d’être ressuscité par lui » (2 Macc 7, 14). « Jésus enseigne le jugement dernier, le ciel et l’enfer. Jésus parle souvent de la "géhenne" du "feu qui ne s’éteint pas" (cf. Mt 5,22 5,29 13,42 13,50 Mc 9,43-48), réservé à ceux qui refusent jusqu’à la fin de leur vie de croire et de se convertir, et où peuvent être perdus à la fois l’âme et le corps (cf. Mt 10, 28). Jésus annonce en termes graves qu’il "enverra ses anges, qui ramasseront tous les fauteurs d’iniquité..., et les jetteront dans la fournaise ardente" (Mt 13, 41-42), et qu’il prononcera la condamnation: "Allez loin de moi, maudits, dans le feu éternel !" (Mt 25,41). » (CEC 1034).

« Ceux qui ont l’intelligence resplendiront comme la splendeur du firmament, et ceux qui sont des maîtres de justice pour la multitude brilleront comme les étoiles pour toujours et à jamais » (Dn 12, 3). Quand quelqu’un sur la terre prie et se sanctifie, presque tous veulent être proches de lui, lui demandent conseil, s’inspirent de son attitude. Après leur décès, les justes et les saints inspirent encore. Mieux, ils intercèdent. Les Écritures et le judaïsme extra-biblique affirment que les patriarches et les matriarches peuvent mériter pour leurs propres fils, et, sur la base de leurs mérites, intercéder pour eux[2]. Chez les Juifs, à Roch Hachana, on se souvient de Rachel pour qu’elle intercède en faveur du peuple infidèle comme jadis, selon le Talmud[3], elle intercéda pour les exilés. Tout au long de son histoire, l’Église a fait l’expérience de l’intercession de la mère de Jésus, et elle y a cru (voir par exemple, la prière devenue classique dans l’Église latine - « Sub tuam misericordiam » -, retrouvée sur un papyrus égyptien datant d’avant le concile de Nicée).

Saint Paul parle « de la venue de notre Seigneur avec ses saints » (1Th 3, 13). Alors, la gloire des bonnes actions des saints rayonnera « comme les étoiles pour toujours et à jamais », et convaincra les habitants de la terre de s’attacher au Christ.

 

Psaume (Ps 15 (16), 5.8, 9-10, 11)

Seigneur, mon partage et ma coupe : de toi dépend mon sort. Je garde le Seigneur devant moi sans relâche ; il est à ma droite : je suis inébranlable. Mon cœur exulte, mon âme est en fête, ma chair elle-même repose en confiance : tu ne peux m’abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption. Tu m’apprends le chemin de la vie : devant ta face, débordement de joie ! À ta droite, éternité de délices !

Chers auditeurs, pouvons-nous dire, en toute vérité : « Seigneur, mon partage et ma coupe : de toi dépend mon sort. Je garde le Seigneur devant moi sans relâche ; il est à ma droite : je suis inébranlable. » ? Voici en ce sens une courte prière de Saint Nicolas de Flüe :

« Mon Seigneur et mon Dieu, prends-moi tout ce qui m’éloigne de Toi.

Mon Seigneur et mon Dieu, donne-moi tout ce qui me rapproche de Toi.

Mon Seigneur et mon Dieu, détache-moi de moi-même pour me donner tout à Toi. »

Chers auditeurs, c’est ce psaume que, le jour de la Pentecôte, Pierre, debout avec les onze autres Apôtres, utilisa pour montrer que Jésus accomplit les écritures : « Le jour de la Pentecôte, Pierre, debout avec les onze autres Apôtres, éleva la voix et leur fit cette déclaration : […] En effet, c’est de lui [Jésus] que parle David dans le psaume : "Je voyais le Seigneur devant moi sans relâche : il est à ma droite, je suis inébranlable. C’est pourquoi mon cœur est en fête, et ma langue exulte de joie ; ma chair elle-même reposera dans l’espérance : tu ne peux m’abandonner au séjour des morts ni laisser ton fidèle voir la corruption. Tu m’as appris des chemins de vie, tu me rempliras d’allégresse par ta présence".

Frères, il est permis de vous dire avec assurance, au sujet du patriarche David, qu’il est mort, qu’il a été enseveli, et que son tombeau est encore aujourd’hui chez nous. [D’ailleurs, le discours de Pierre a lieu depuis la terrasse du cénacle et le tombeau de David est juste en contrebas]. Comme il était prophète [David], il savait que Dieu lui avait juré de faire asseoir sur son trône un homme issu de lui. Il a vu d’avance la résurrection du Christ, dont il a parlé ainsi : Il n’a pas été abandonné à la mort, et sa chair n’a pas vu la corruption. Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit Saint qui était promis, et il l’a répandu sur nous, ainsi que vous le voyez et l’entendez. » (Ac 2, 14.22b-33)

Le psaume exprimait la confiance qu’avait David de ne pas être battu, ni laissé sans sépulture sur le champ de bataille. Mais dans notre contexte, Jésus est déjà mort. L’espérance incluse dans le Psaume de ne pas voir l’Hadès ni la corruption s’applique de ce fait à la Résurrection du Christ et non plus à l’invincibilité du Roi. Peut-être ce psaume était-il déjà lu à l’époque de Jésus dans le cadre des spéculations sur la résurrection. En tout cas, rrrrr il est maintenant appliqué sans ambages à la résurrection de celui qui est, dans le même temps, désigné comme Roi et Fils de David.

Pierre affirme que Jésus est le Messie, le Roi davidique, par la résur­rection. Pour cela, il place au ciel le trône davidique anciennement situé à la droite du Temple ou de l’autel. Jésus avait refusé, de son vivant, de s’asseoir sur le trône terrestre de David et d’y jouer le rôle d’un messie libérateur, mais maintenant qu’il est monté au ciel, il siège à la droite de Dieu.

Sa royauté est spirituelle, cela signifie qu’elle ne s’exerce pas par les moyens de coercition, mais par le rayonnement de l’amour. Le titre de sa royauté était écrit sur l’écriteau de sa croix. Au calvaire, c’était ironique, mais c’était une vérité. Lors de sa résurrection, sa royauté est le fruit de sa Passion.

La première raison pour laquelle l’homme pèche, c’est son manque d’amour. La Passion de Jésus est celle de l’amour, et l’amour fut restauré et replacé à son juste niveau. Le péché vole à Dieu la gloire qui lui est due. En souffrant pour les péchés, la gloire du Père fut restaurée et replacée à son niveau.

Le péché engendre la faiblesse chez l’homme, par sa Passion, Jésus restaure en l’homme sa force perdue ; la force des créatures fut restaurée et replacée à son niveau.

« Tu m’apprends le chemin de la vie : devant ta face, débordement de joie ! À ta droite, éternité de délices ! ».

Quelques messages présumés de Medjugorje :

« Ouvrez-vous à Dieu et donnez-lui toutes vos difficultés et vos croix, pour que Dieu transforme tout en joie. Vous ne pouvez pas vous ouvrir à Dieu si vous ne priez pas. » 25.07.1989

« Au Ciel se trouve la joie à travers laquelle vous pouvez vivre le Ciel dès à présent. » 25.05.1991

« Je ne souhaite pas que votre vie soit dans la tristesse mais qu’elle soit réalisée dans la joie pour l’éternité, selon l’Evangile. » Noël 1996

Et saint Bernard témoigne : « Oui, ils sont les bien-aimés, ceux qui s’enivrent de Charité ! Oui, ils sont enivrés de joie, ceux qui ont le bonheur d’être introduits aux noces de l’Agneau. Ils sont les bien-aimés, enivrés de joie, ceux qui mangent et boivent à la Table de l’Agneau, dans son royaume. Quand il fait paraître devant lui l’Église glorieuse, sans tache ni ride, sans imperfection quelconque. Alors l’Agneau enivre ses bien-aimés du torrent de sa joie. Et de cette chaste étreinte de l’Époux et de l’Épouse dans le royaume, jaillit un fleuve impétueux qui répand le bonheur dans la cité de Dieu. » (St Bernard, Traité de l’amour de Dieu § 32).

Le psaume : « Tu m’apprends le chemin de la vie : devant ta face, débordement de joie ! À ta droite, éternité de délices ! » s’applique aussi à Marie, selon l’expression du concile Vatican II : « En Marie, l’Église admire et exalte le fruit le plus excellent de la Rédemption, et, comme dans une image très pure, elle contemple avec joie ce qu’elle-même désire et espère être tout entière. » (Vatican II, S.C.103)

Et saint Maximilien Kolbe dit : « Il faut comprendre quel grand bonheur est la paix de l’âme procurée par notre consécration totale à l’Immaculée. Cette paix profonde est un bonheur intraduisible. Et si sur cette terre déjà elle est comme un goût du ciel, ce que ce sera dans le ciel, on ne peut pas le dire ! » (St Maximilien Kolbe, ESI. p.145)

 

Deuxième lecture (He 10, 11-14.18)

« 11 Dans l’ancienne Alliance, tout prêtre, chaque jour, se tenait debout dans le Lieu saint pour le service liturgique, et il offrait à maintes reprises les mêmes sacrifices, qui ne peuvent jamais enlever les péchés. 12 Jésus-Christ, au contraire, après avoir offert pour les péchés un unique sacrifice, s’est assis à la droite de Dieu pour toujours. 13 Il attend désormais que ses ennemis soient mis sous ses pieds. 14 Par son unique offrande, il a mené à leur perfection ceux qu’il sanctifie, pour toujours. 18 Or, quand le pardon est accordé, on n’offre plus le sacrifice pour le péché. – Parole du Seigneur.

Cette lecture présente la succession chronologique des sacrifices anciens et du sacrifice nouveau, et les chrétiens doivent garder le sens de l’histoire : il y a un « avant » et un « après » Jésus-Christ.

Les versets qui précèdent le passage donné par la liturgie mettent très en relief la volonté divine : « 8 Il commence par dire : Sacrifices, oblations, holocaustes, sacrifices pour les péchés, tu ne les as pas voulus ni agréés -- et cependant ils sont offerts d’après la Loi -- , 9 alors il déclare : Voici, je viens pour faire ta volonté. Il abroge le premier régime pour fonder le second. 10 Et c’est en vertu de cette volonté que nous sommes sanctifiés par l’oblation du corps de Jésus Christ, une fois pour toutes » (Hé 10, 8-10).

Dieu a abrogé [baṭṭel] l’ancien culte, c’est une volonté divine qui ne peut pas être contestée. Un chrétien ne peut pas revenir à l’ancien culte ni souhaiter son rétablissement. Dieu a pris l’initiative de notre salut et de ses modalités. On retrouve cette idée dans les paroles de Jésus à Nicodème :

« C’est ainsi que Dieu a tant aimé le monde, / qu’il a donné son Fils Unique
pour que quiconque croit en Lui, / ne périsse pas ;

mais qu’il ait / la vie qui est pour toujours » (Jn 3, 16).

Dans le mécanisme du bouc émissaire étudié par René Girard, c’est la mort de la victime qui évacue la crise de la société, jusqu’à la crise suivante… Mais dans le sacrifice du Christ, ce n’est pas sa mort qui plaît à Dieu, mais c’est l’offrande de cette mort, « l’oblation du corps de Jésus-Christ » un sacrifice inspiré par l’hommage rendu au Père et par l’amour pour les hommes. Comme Jésus l’a dit lui-même :

« Ma nourriture, / à moi,
c’est que je fasse la volonté de Celui qui m’a envoyé / et que j’accomplisse son œuvre. »
(Jn 4, 34)

« Si je suis descendu depuis les Cieux, / ce ne fut pas pour que je fasse ma volonté,
mais pour que je fasse / la volonté de celui qui m’a envoyé ! » 
(Jn 6, 38)

&

« Dans l’ancienne Alliance, tout prêtre, chaque jour, se tenait debout dans le Lieu saint pour le service liturgique, et il offrait à maintes reprises les mêmes sacrifices, qui ne peuvent jamais enlever [lamḏakkāyū purifier, donc extirper] les péchés. » (He 10, 11) Ce verset, un peu ironique, doit s’entendre en fonction du v. 1. « N’ayant, en effet, que l’ombre des biens à venir, non la substance même des réalités, la Loi est absolument impuissante, avec ces sacrifices, toujours les mêmes, que l’on offre perpétuellement d’année en année, à rendre parfaits ceux qui s’approchent de Dieu » (He 10, 1). Revenir au judaïsme serait un manque de foi en l’œuvre parfaite du Christ. De surcroit, si les sacrifices sont abolis, le sacerdoce d’Aaron l’est aussi.

« 12 Jésus-Christ, au contraire, après avoir offert pour les péchés un unique sacrifice, s’est assis à la droite de Dieu pour toujours. 13 Il attend désormais que ses ennemis soient mis sous ses pieds. 14 Par son unique offrande, il a mené à leur perfection ceux qu’il sanctifie, pour toujours. »

Le Christ "assis" (v. 12) n’a plus qu’à attendre (v. 13) le résultat de son œuvre. Le royal repos (He 1, 3.8) s’oppose à l’attitude debout et à l’activité incessante des prêtres lévitiques qui n’en finissent jamais d’offrir des sacrifices. La position debout étant celle du serviteur et de l’action (cf. Dt 10, 8 ; 17, 12 ; 18, 7), et qui officient pour rien : le péché n’est pas extirpé, il demeure.

Il y a un accent triomphal dans la locution complète « Jésus-Christ = Jésus le Messie » (He 10, 12 cf. He 13, 8, 21) et surtout dans le « pour toujours [l-ᶜālam] » mis deux fois en vedette à la fin de la phrase au v. 12 et au v. 14. Il ne se rapporte pas à la sanctification des chrétiens mais à l’unique et définitive oblation du corps de Jésus. Ce fut le dernier des sacrifices sanglants. « L’immolation du calvaire fut si parfaite qu’elle fut le sacrifice suprême. L’infini est unique. »[4]

« Et de sa plénitude / nous avons tous reçu ;
et grâce, / sur grâce [5]. » (Jn 1, 16).

Son œuvre bonne fut parfaite, il n’y a rien à y ajouter ; les chrétiens ont confiance dans la participation aux fruits durables ou permanents de ce sacrifice ; il y a une application incessante et progressive (Jn 1, 16) de l’offrande du Christ dans l’âme des fidèles. C’est suggérer en outre que la sainteté chrétienne dérive du Calvaire.

He 10, 15-17 prend à témoin le prophète Jérémie (Jr 31, 33-34), qui atteste la rémission des péchés et le caractère spirituel de la nouvelle alliance. Cette prophétie était importante pour les premiers chrétiens d’origine juive. La lecture liturgique a omis cette référence et reprend au verset 18, qui conclut le thème du sacerdoce du Christ. « Or, quand le pardon est accordé, on n’offre plus le sacrifice pour le péché. » (He 10, 18).

La religion chrétienne est ici envisagée comme une purification et une sanctification accordée par Dieu, grâce à Jésus-Christ. Le sacrifice de la Messe est donc le sacrement de « l’oblation » permanente du Grand Prêtre au ciel. Ce n’est pas un nouveau sacrifice mais son actualisation, l’application de ses fruits à chaque croyant, la participation aux vertus de sa Passion, la communion au Sauveur et vivificateur.

La suite de la lettre aux Hébreux met en lumière les applications pratiques :

- Issue du sang de Jésus qui purifie du péché, la vie chrétienne est une vie sainte s’épanouissant dans les vertus de foi, d’espérance et de charité (He 10, 19-24, cf. He 10 ,29 ; He 12, 24 ; He 13, 12, 20).

- La vie chrétienne est aussi une vie d’Église, une vie collective dans « la maison » ou dans la « cité de Dieu », avec les anges (He 10, 21,24,25 ; He 11, 40 ; 12, 1, 14, 15, 23 ; He 13, 7, 17, 24).

- La vie chrétienne est orientée vers la venue glorieuse du Christ (He 9, 28), et vers la Jérusalem céleste (He 12, 18-29 ; He 13, 13-14).

 

Évangile (Mc 13, 24-32)

« 24 Or, en ces jours-là, / après cette détresse-là :

le soleil / s’obscurcira,

et la lune / ne donnera plus de sa lumière.

25 les étoiles / tomberont des cieux

et les puissances des cieux / seront ébranlées.

26 et, alors, ils verront le Fils de l’homme / venir sur les nuées,

avec grande puissance / et avec gloire.

27 Et alors il enverra ses anges, / et il rassemblera ses élus des quatre vents,

depuis l’extrémité de la terre / jusqu’à l’extrémité des cieux. »

28 À partir du figuier, donc, / instruisez-vous de l’analogie :

dès que s’attendrissent ses branches / et que bourgeonnent ses feuilles,

vous savez / qu’est arrivé l’été !

29 De même, / vous aussi :

dès que vous verrez / toutes ces choses-ci arriver

sachez qu’elle est proche [l’heure] / à la porte !

30 Amen, / je vous le dis :

Cette génération ne passera pas / que toutes ces choses ne soient.

31 Les cieux et la terre passeront, / mais mes paroles ne passeront pas ! 

32 Mais ce jour-là / et cette heure-là,

personne ne les connaît ; / ni même les anges des cieux

ni le Fils, / sinon le Père. » – Acclamons la Parole de Dieu.

« Le soleil s’obscurcira » (v. 24), il ne sera pas détruit mais éclipsé par l’éclat du Fils de l’homme, de même la lune, et les étoiles (v. 25). Le Fils de l’homme viendra « sur les nuées », ce ne sera donc pas un retour matériel pouvant mettre en œuvre des moyens militaires. Cependant, « il viendra avec grande puissance / et avec gloire » (v. 26). L’expression « Fils de l’homme » se réfère au livre de Daniel où il est prophétisé que le Fils de l’homme viendra sur les nuées du Ciel pour opérer le jugement du monde, et notamment le jugement de « la bête », c’est-à-dire un empire particulièrement destructeur, et pour recevoir un Empire éternel (Dn 7).

« 27 Et alors il enverra ses anges, / et il rassemblera ses élus des quatre vents,

depuis l’extrémité de la terre / jusqu’à l’extrémité des cieux » (Mc 13, 27).

Il rassemblera les élus, c’est comme dans l’image d’une moisson qui rassemble les épis, et ce verset rappelle une parabole dans l’évangile de Matthieu au chapitre 13 :

« 40 De même que l’on trie l’ivraie [la mauvaise herbe] pour la jeter au feu, / ainsi en sera-t-il à la plénitude de ce monde. [« šūlāmēh d-ᶜālmā » la perfection, la fin, la plénitude du monde, ce qui est tout autre chose que de dire simplement que c’est la fin du monde.]

41 Le Fils de l’homme enverra ses anges, / et ils enlèveront de son Royaume

toutes les causes de chute / et ceux qui font le mal ;

42 ils les jetteront dans la fournaise de feu :

là-bas, il y aura des pleurs / et le grincements des dents.

43 Alors les justes[6] resplendiront / comme le soleil dans le royaume de leur Père. » (Mt 13, 41-43)

Nous entrons dans un mystère, celui d’un royaume qui est sur la terre tout en faisant partie des fins dernières, après un jugement… Une chose est sûre : il ne nous appartient pas de faire le tri et « d’arracher l’ivraie ».

Saint Augustin, dans son sermon 259 explique que l’image du froment qui restera sur l’aire, purifié de l’ivraie, correspond au temps de la Parousie (c’est-à-dire à la Venue glorieuse du Christ), qu’il appelle le 7e jour, tandis que le froment qui est placé dans les greniers, correspondant à l’éternité, qu’il appelle le 8e jour.

Mc 13, 28-29. Par l’analogie du figuier, Jésus prophétise que sa venue glorieuse inaugurera un « été » spirituel, image de la sérénité dont les justes jouiront après ce jour [7]. Jésus répond aussi à la tentation de la fièvre apocalyptique : comme l’été n’arrive pas avant que ne bourgeonnent les feuilles, il faut savoir attendre d’avoir vu « toutes ces choses » dont Jésus vient de parler avant de penser que « l’heure est proche » (v. 29).

« Cette génération ne passera pas que toutes ces choses ne soient » (Mc 13, 30). On a beaucoup discuté pour savoir si Jésus s’était trompé sur les délais en effet, le grec γενεα, le latin generatio, et le mot français génération évoquent au maximum la durée de vie d’un homme ; mais ce n’est pas du tout le cas en araméen où le mot « šarbṯā » désigne d’abord une souche, une race, une tribu, une famille, un peuple, donc non seulement une génération, mais aussi une série de générations. Jésus exhorte à l’espérance : malgré l’obscurcissement du soleil, la race [šarbṯā] des hommes ne passera pas sans que ne se réalise le but de la création. Et la race humaine doit accomplir le but pour lequel elle a été créée et faire la volonté de Dieu sur la terre comme au ciel, avant d’entrer, en tant que race humaine, dans l’éternité.

Le discours de base des faux prophètes consiste à prétendre réaliser le salut à la place de Jésus :

  • Les uns veulent imposer au monde un remède définitif – ce remède exigera évidemment que tous les hommes y soient soumis (messianisme politique)[8].
  • D’autres s’intéressent à l’intériorité humaine et prétendent offrir un épanouissement personnel supérieur (gnose) ; là aussi, une conclusion se déduit : tout le monde devrait suivre un tel modèle spirituel.

Jésus sait que toutes les usurpations seront vaines et tomberont : « Les cieux et la terre passeront, / mais mes paroles ne passeront pas ! » (Mc 13, 31). 

Du fait que de faux messies pourront opérer une contrefaçon du christianisme[9], le jugement ne pourra plus se faire uniquement pour ou contre Jésus, parce qu’une grande partie des hommes n’auront pas à accès à une vraie connaissance de Jésus. Logiquement, un unique Antichrist (2Th 2, 8) devra un jour se manifester mondialement, pour que le jugement du monde puisse aussi se faire pour ou contre l’Antichrist. Jésus a prévu cette perspective, et savoir qu’alors son retour ne sera pas immédiat. Et, logiquement, seul le Père connaît le Jour et l’Heure pour la bonne raison que cela dépend des hommes et de la manifestation ultime de l’Antichrist que le retour du Christ jugera.

« Mais ce jour-là / et cette heure-là,

personne ne les connaît ; ni même les anges des cieux

ni le Fils [en son humanité bien sûr], / sinon le Père » (Mc 13, 32).

 

[2] Cf. LE DEAULT R., Aspects de l’intercession dans le Judaïsme ancien, dans « Journal for the study of judaism » n°1 (1970), p.33-57

[3] Meg. 13b ; Baba Batra 123a.

[4] C. SPICQ (o.p.), L’épître aux Hébreux, Gabalda Sources bibliques, Paris, 1977 p. 167

[5] ṭaybūṯā : grâce, bonté.

[6] « zaddīqe » : Mgr Alichoran traduit « les saints illumineront » parce que ce n’est pas seulement une question de justice juridique (kinūtā). Je préfère réserver « saints » à la traduction de « qaddīšin », comme il est écrit : « Soyez saints [qaddīšin], car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint [qaddīšā] » (Lv 19, 2) ou saint Paul évoquant l’avènement du Seigneur « avec tous ses saints [qaddīšaw] » (1Th 3, 13).

[7] Interprétation de Jean Chrysostome sur le texte parallèle de Matthieu, Sur saint Matthieu, homélie 77, ibid., p. 68

[8] C’est une pensée sectaire où tous les bons sont dans la secte et tous les mauvais sont en dehors. Les gens de la secte s’arrogent le droit de maudire tous les autres, dès lors qu’ils sont le camp du mal ou « camp de Bélial », comme le dit un texte de Qumran (Regle II, 4).

[9] Ils porteront le masque [prosôpon] du Christ, comme le dit saint CYRILLE : « en s’appliquant à eux-mêmes son visage [prosôpon] » Saint CYRILLE de Jérusalem, Fragment 318, J, Reuss, Lukas-Kommentare, p. 204, cité par Bovon, op. cit, p. 164, note 164.

Date de dernière mise à jour : 15/10/2024