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Voici pour mémoriser le texte de l'évangile de ce jour en vue d'une récitation orale avec reprises de souffles.

Evangile mc 10 2 16Evangile Mc 10, 2-16 (84.29 Ko)

Podcast sur  : https://radio-esperance.fr/antenne-principale/entrons-dans-la-liturgie-du-dimanche/#

Sur Radio espérance : tous les mardi, mercredi, jeudi et vendredi à 8h15
et rediffusées le dimanche à 8h et 9h30). 

Première lecture (Gn 2, 18-24) 1

Psaume (Ps 127 (128), 1-2, 3, 4-6) 3

Deuxième lecture (He 2, 9-11) 5

Évangile (Mc 10, 2-16) 7

Première lecture (Gn 2, 18-24)

Le Seigneur Dieu dit : ‘Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Je vais lui faire une aide qui lui correspondra’. Avec de la terre, le Seigneur Dieu modela toutes les bêtes des champs et tous les oiseaux du ciel, et il les amena vers l’homme pour voir quels noms il leur donnerait. C’étaient des êtres vivants, et l’homme donna un nom à chacun. L’homme donna donc leurs noms à tous les animaux, aux oiseaux du ciel et à toutes les bêtes des champs. Mais il ne trouva aucune aide qui lui corresponde. Alors le Seigneur Dieu fit tomber sur lui un sommeil mystérieux, et l’homme s’endormit. Le Seigneur Dieu prit une de ses côtes, puis il referma la chair à sa place. Avec la côte qu’il avait prise à l’homme, il façonna une femme et il l’amena vers l’homme. L’homme dit alors : ‘Cette fois-ci, voilà l’os de mes os et la chair de ma chair ! On l’appellera femme – Ishsha –, elle qui fut tirée de l’homme – Ish.’ À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. – Parole du Seigneur. 

Nous pensons que le premier chapitre de la Genèse (la création en 7 jours) a été composé pendant l’exil à Babylone et que Genèse 2-3 est un récit de création plus primitif, donc à l’origine indépendant du chapitre premier. C’est en ce sens que Jésus se réfère à ce texte en y lisant la création de l’homme et de la femme et l’union conjugale :

 « 6 Depuis le commencement, toutefois, / c’est mâle et femelle que Dieu les fit.
7
A cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, / et s’attachera à sa femme ;

8
et ils ne feront, eux deux, / qu’une chair unique.

Désormais, ils ne sont plus deux, / mais une chair unique.

9
Ce que Dieu, par conséquent, / a conjoint

que l’homme / ne le sépare pas !’ » (Mc 10, 6-9 de l’araméen)

Jésus cite donc le livre de la Genèse, avec une petite différence : il introduit le mot « chair » qui n’était pas dans la Genèse.

Il reste cependant tout à fait légitime d’étudier les trois premiers chapitres de la Genèse ensemble et dans l’ordre où l’éditeur biblique, lui aussi inspiré, les a placés. C’est la perspective que j’ai présentée dans  Françoise BREYNAERT, Jean, L’évangile en filet. L’oralité d’un texte à vivre. (Préface Mgr Mirkis – Irak) Éditions Parole et Silence. Paris, 8 décembre 2020. 477 pages, réédité).

Il faut alors comprendre que dans le second chapitre de la Genèse, Adam signifie l’ensemble de l’humanité, car la nature humaine a déjà été créée « homme et femme » au sixième jour (Gn 1, 27).

Adam nomme les animaux (Gn 2, 19), mais il n’y trouve pas d’aide. Il reconnaît dans les animaux certaines puissances de son propre psychisme (par exemple, Jésus compare Hérode à un « renard » : « Allez dire à ce renard : voici que je chasse les démons… » (Lc 13, 32). Autrement dit : si tu es rusé comme un renard pour déjouer les complots, tu devrais profiter de ma puissance à chasser les démons !).

Cependant, aucun animal ne peut aider Adam, l’humanité, à gouverner le monde avec sagesse.

Cela signifie aussi qu’il est infrahumain de se limiter à communiquer des informations ou des affects, comme le font les animaux. Par exemple, les abeilles se communiquent l’information où sont les fleurs ; les chiens et les chats ont des affects, des affections ; mais nous ne pouvons pas nous limiter à cela.

Adam a reçu de la divinité une haleine de vie (en hébreu « Neshamah ») différente de celle des animaux (en hébreu « nefesh ») et par conséquent, aucun animal ne peut aider l’homme à prendre conscience de ce qu’il a reçu de la divinité, ni à reconnaître sa propre humanité !

Cela signifie aussi que pour que la communication entre deux humains soit réellement humaine, il faut que ce soit une communication « en Dieu », par exemple, le mari, la femme, et Dieu. Et cela, Adam ne peut pas le trouver pas dans sa vie psychique [1].

YHWH (le Seigneur) empêche l’homme de combler ce manque par sa propre imagination. Il plonge l’homme dans un sommeil et, de son côté, le Seigneur forme « Isha » (en hébreu). Or l’être humain reconnaît Isha comme l’os de ses os et la chair de sa chair, c’est-à-dire comme sa propre intériorité et sa vie. L’intériorité profonde d’Adam est comme projetée à l’extérieur pour qu’il puisse en prendre connaissance : YHWH (le Seigneur) lui rend possible la connaissance de ce qui le constitue comme être humain. Isha représente son intériorité, sa sagesse, tirée de son côté, « l’intérieur de l’intérieur » qui correspond dans la quaternité du Temple au « Saint des Saints ».

La femme contingente a déjà été « créée » le 6e jour, ici, nous avons le verbe « banah », construire : « Isha » n’est pas une « création », mais un acte de la « providence » divine (Gn 2, 18-25). Dieu donne à Adam une information qui ne lui était pas accessible par le processus de la connaissance ordinaire. Pour accéder à cette révélation, il faut un nouveau mode de connaissance qui est proprement l’acte de foi.

À ce stade du récit de Gn 1–3, la femme contingente existait déjà, sinon elle ne pourrait pas servir de figure pour autre chose. Isha n’est pas la femme mariée à un homme appelé Ish. Elle est l’aide en tant qu’intelligence inspirée, qui est dans l’homme la forme la plus haute de la vie. C’est elle, l’intelligence ou sagesse qui peut recevoir la parole divine quand l’homme s’éveille à la Foi [2]. C’est « l’intériorité de l’intériorité », capable non seulement de gouverner, mais d’écouter Dieu pour gouverner selon la sagesse divine, comme les sages l’expliqueront clairement plus tard : « C’est elle [la Sagesse] qui protégea le premier modelé, père du monde, qui avait été créé seul [Gn 2, 18], c’est elle qui le tira de sa propre chute et lui donna la force de devenir maître de tout » (Sagesse 10, 1-2).

Adam représente ici tout être humain sur la terre (Adamah). Son usage de l’intelligence sera juste et bon s’il écoute ce qui vient de cette « femme-Sagesse ».

Mais il y eut le premier péché… Adam s’excuse : « C’est la femme que tu as mise auprès de moi qui m’a donné de l’arbre, et j’ai mangé ! » (Gn 3, 12). Ce qui est vrai, mais n’explique nullement pourquoi il a accepté de manger. La femme-Sagesse dit : « Le serpent m’a fait oublier [verbe nasha] et j’ai mangé » (Gn 3, 13). On peut lire le verbe nasha dans le sens de « tromper » mais aussi dans le sens de « faire oublier », ce qui est une forme de tromperie. Sans un oubli, la femme ne pouvait pas confondre les arbres dont il faut manger (l’arbre de vie et les arbres du jardin), avec l’arbre dont il ne faut pas manger sous peine de destruction (« l’arbre bon et mauvais » le texte hébreu a ici des adjectifs Gn 2, 9), c’est-à-dire l’arbre d’une connaissance inconnaissable sauf par l’initiative de Dieu. Cette faute originelle est la source de toutes les fausses révélations et de toutes les fausses sagesses.

Alors, chers auditeurs, demandons à Dieu sa sagesse, et que Dieu vous bénisse.

Psaume (Ps 127 (128), 1-2, 3, 4-6)

Heureux qui craint le Seigneur et marche selon ses voies ! Tu te nourriras du travail de tes mains : Heureux es-tu ! À toi, le bonheur ! Ta femme sera dans ta maison comme une vigne généreuse, et tes fils, autour de la table, comme des plants d’olivier. Voilà comment sera béni l’homme qui craint le Seigneur. De Sion, que le Seigneur te bénisse ! Tu verras le bonheur de Jérusalem tous les jours de ta vie, et tu verras les fils de tes fils. Paix sur Israël. 

Ce psaume est un chant d’amour où apparaissent, dans la maison où l'homme et son épouse sont assis à table, les enfants qui les accompagnent comme « des plants d'olivier » (Ps 128,3), c'est-à-dire pleins d'énergie et de vitalité. 

Au commencement, le père est présenté comme un travailleur, qui par l'oeuvre de ses mains peut assurer le bien-être physique et la sérénité de sa famille. Heureux es-tu !

Dans sa famille règnent l'amour et le respect mutuels ; les enfants y sont attendus et reçus comme des dons de Dieu. Si la douleur et l'épreuve entrent au foyer, la confiance en Dieu l’adoucit et en fait un moyen providentiel de purification et de croissance : « Voilà comment sera béni l’homme qui craint le Seigneur. De Sion, que le Seigneur te bénisse ! Tu verras le bonheur de Jérusalem tous les jours de ta vie, et tu verras les fils de tes fils ».

Nous savons bien que dans la famille, l’enfant élabore une image de ses parents pour instaurer la sienne.

 Il a besoin de se savoir aimé. Parfois il peut conclure, à tort ou à raison, qu’il n’est pas aimé, qu’il est de trop. L’enfant a besoin de se situer par rapport au désir et à l’amour que ses parents ont pour lui. (L’existence de la contraception et de l’avortement rend aiguës ces questions chez les enfants). La plupart des parents laissent entendre à travers leur conduite : « Nous nous aimons tellement que nous avons voulu te donner la vie ». Et l’enfant est rassuré de savoir que ses parents ont pris cette responsabilité pour lui.

Jésus dans l’Evangile montre de l’amour envers les petits enfants, il répond à leur besoin d’être désirés et aimés pour eux-mêmes.

Prenons conscience combien sont répandues dans notre société certaines attitudes envers les enfants qui ne sont pas ajustées :

- L’enfant-roi impose son rythme et ses humeurs.

- L’enfant-partenaire n’a plus besoin d’apprentissage ni d’éducation, il est un adulte en réduction. Certains adultes finissent par regarder l’enfant comme un enfant-conjoint, pour en recevoir gratitude et valorisation.

- Dans l’absence des adultes, les enfants doivent très tôt prendre appui sur eux-mêmes plus que sur les adultes, et au début l’opération semble réussir, mais ces individus s’écroulent souvent ensuite dans des conduites immatures, faute d’être psychologiquement étayé.

- L’enfant trop idéalisé doit être conforme au désir parental dès la première amniosynthèse. Dans cette direction, l’adulte tente de faire faire à l’enfant ce qu’il n’a pas réussi, ou de revivre sa propre enfance. L’enfant dans cette situation a du mal à tenir compte du principe de réalité, il a du mal à engager une réflexion sur soi. L’enfant existe d’abord dans le discours des parents, mais les parents doivent aussi le reconnaître comme distinct, unique, aimé de Dieu son Créateur.

En cas de conflit familial, toutes ces attitudes excessives, mal ajustées, se durcissent. L’adulte risque d’impliquer l’enfant-partenaire dans ce conflit qui ne le regarde pas, il risque de faire revivre à ses enfants ses propres blessures d’enfance, il risque de laisser l’enfant sans éducation véritable, etc.

En cas de séparation, l’enfant qui était en train de construire sa personnalité en lien avec ses deux parents se sent pénalisé, interrompu dans son travail intérieur. La séparation des parents fissure l’enfant. La première expérience du réel s’effondre. Le monde extérieur peut apparaître comme dangereux. Perdant la relation avec la cohérence des deux parents, l’enfant a tendance à croire que sa naissance est annulée.

Il est donc très important au moins que l’enfant comprenne que ses parents continuent de l’aimer et restent ses parents et gardent leur responsabilité à son égard. Un parent doit donc absolument éviter d’annuler l’autre dans la façon de parler de lui et d’agir. Dans bien des cas, il faudrait traiter les tensions et négocier sans aller jusqu’à la séparation. De plus, il arrive souvent que l’enfant se croie la cause de la séparation des parents, tout simplement parce qu’un jour il a souhaité cette séparation pour obtenir les faveurs de l’un ou de l’autre, ou pour rester avec le parent préféré. S’il se sent coupable, il cherchera à se punir (auto-agression), ou provoquera des punitions par un mauvais comportement scolaire ou social.

Mais plus profondément, l’enfant ayant besoin de la cohérence de ses parents, il lui est très difficile d’être mis en position de choisir un parent, car cela signifie entrer dans un processus de deuil. Quand c’est la société qui décide, l’enfant pourra s’en prendre au juge et non pas à lui-même. A ce propos, l’enfant ne doit pas percevoir un jugement négatif sur le parent qui n’a pas obtenu la garde, il doit seulement savoir que c’est la décision la meilleure pour lui, selon ce que lui a besoin pour se nourrir affectivement [3].

La famille recomposée semble offrir à l’adulte une solution, souvent rapide. Mais un long travail attend l’enfant.

D’une part, dans son souhait profond de voir la réconciliation de ses parents, l’enfant voudrait inconsciemment casser cette nouvelle famille, les adultes lui demandent de faire le deuil de ce désir.

D’autre part, l’enfant change de rôle dans la fratrie. Par exemple, une fillette de 11 ans qui était l’aînée, organisée et petite mère, se voit remise en place par les grands qui arrivent. Autre exemple, un adolescent de 17 ans se retrouve dans une chambrée de petits et n’a plus de place pour ses affaires. Etc.

Pour tout ce travail intérieur, l’enfant a besoin du Christ, de sa grâce, de son Esprit Saint. « Laissez les petits enfants et ne les empêchez pas de venir à moi » dit Jésus (Mc 10, 14). Pour faire le deuil de l’unité du couple dont il est né, l’enfant a besoin de la révélation de Dieu créateur : l’enfant est désiré et aimé par Dieu créateur d’une manière unique. L’adaptation de l’enfant à un nouvel environnement a besoin de patience, d’espérance, de charité, de tous les dons de l’Esprit.

Et bien chers auditeurs, que le Seigneur aide nos familles, et qu’il aide les enfants, amen.

Deuxième lecture (He 2, 9-11)

Frères, Jésus, qui a été abaissé un peu au-dessous des anges, nous le voyons couronné de gloire et d’honneur à cause de sa Passion et de sa mort. Si donc il a fait l’expérience de la mort, c’est, par grâce de Dieu, au profit de tous. Celui pour qui et par qui tout existe voulait conduire une multitude de fils jusqu’à la gloire ; c’est pourquoi il convenait qu’il mène à sa perfection, par des souffrances, celui qui est à l’origine de leur salut. Car celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés doivent tous avoir même origine ; pour cette raison, Jésus n’a pas honte de les appeler ses frères, – Parole du Seigneur. 

Chers auditeurs, Jésus se retire souvent à l'écart, sur la montagne, de préférence de nuit, pour prier (Mc 1,35 ; Lc 5,16). Il porte les hommes dans sa prière, puisque aussi bien Il assume l'humanité en son Incarnation, et Il les offre au Père en S'offrant Lui-même. Lui, le Verbe qui a assumé la chair, participe dans sa prière humaine à tout ce que vivent « ses frères » (He 2,12) ; Il compatit à leurs faiblesses pour les en délivrer (He 2,15 ; 4,15). C'est pour cela que le Père L'a envoyé. (cf. CEC 2602)

Que l’amour de Jésus nous inspire à notre tour. Prier pour soi, c'est l'inspiration de la nature, prier pour les autres, c'est l'inspiration de la grâce…

«  En épousant dans son coeur humain l'amour du Père pour les hommes, Jésus "les a aimés jusqu'à la fin" (Jn 13,1) "car il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime" (Jn 15,13). Ainsi, dans la souffrance et dans la mort, son humanité est devenue l'instrument libre et parfait de son amour divin qui veut le salut des hommes (cf. He 2,10 2,17-18 4,15 5,7-9). En effet, il a librement accepté sa passion et sa mort par amour de son Père et des hommes que Celui-ci veut sauver: "Personne ne m'enlève la vie, mais je la donne de moi-même" (Jn 10,18). » (CEC 609) « Au bénéfice de tout homme Jésus a goûté la mort (cf. He 2,9). C'est vraiment le Fils de Dieu fait homme qui est mort et qui a été enseveli » (CEC 629). « Pendant le séjour du Christ au tombeau sa Personne divine a continué à assumer tant son âme que son corps séparés pourtant entre eux par la mort. C'est pourquoi le corps du Christ mort "n'a pas vu la corruption" (Ac 12,37). » (CEC 630) « Le Christ est donc descendu dans la profondeur de la mort (cf. Mt 12,24 Rm 10,7 Ep 4,9) afin que ‘les morts entendent la voix du Fils de l’Homme et que ceux qui l’auront entendue vivent’ (Jn 5,25). Jésus, ‘le Prince de la vie’ (Ac 3,15), a ‘réduit à l’impuissance, par sa mort, celui qui a la puissance de la mort, c’est-à-dire le diable, et a affranchi tous ceux qui leur vie entière, étaient tenus en esclavage par la crainte de la mort’ (He 2,14-15) » (CEC 635).

Comme dans la vie de Jésus la Résurrection suit la Croix, comme dans le Rosaire les mystères glorieux suivent les mystères douloureux, et comme le dimanche suit le vendredi. « La douleur n’a qu’un temps bien court, le bonheur aura la bienheureuse éternité. La croix est attachée à la joie, mais la Résurrection suit de bien près la mort. Il y a des jours de pluie quelquefois bien désolants, mais que de beaux jours de soleil en compensation ! » [4] « Il a vaincu la mort et l’aiguillon de la mort et, triomphateur suprême depuis sa Résurrection glorieuse, il fait passer dans les âmes les mêmes agonies mortelles. Il ne les enferme dans la nuit des tombeaux que pour les ressusciter à l’amour et les faire sortir plus pleines de vie après les avoir ensevelies » [5].

Saint Jean Damascène raconte ainsi la fin de la vie de Marie : A ce moment certains faits durent survenir, en accord avec ces circonstances et réclamés par elles, me semble-t-il : je veux dire la venue du Roi vers sa propre mère, pour accueillir, de ses mains divines et pures, sa sainte âme toute claire et immaculée. Et elle, sans doute, dit alors : Dans tes mains, mon Fils, je remets mon esprit. Reçois mon âme, qui t'est chère, et que tu as préservée de toute faute. A toi, et non à la terre, je remets mon corps : garde sain et sauf ce corps en qui tu daignas habiter, et dont, en naissant, tu préservas la virginité. Emporte-moi près de toi, afin que là où tu es, toi le fruit de mes entrailles, je sois aussi, pour partager ta demeure ! Je m'empresse de retourner à toi, qui descendis vers moi eu supprimant toute distance. Quant à mes enfants très aimés, que tu as bien voulu appeler tes frères (He 2,11-12), console-les toi-même de mon départ. Ajoute à celle qu'ils ont déjà une nouvelle bénédiction par l'imposition de mes mains. - Et levant les mains, on peut croire qu'elle bénit les assistants réunis. Après ces mots, elle entendit à son tour une voix : Viens ma mère bénie, ‘dans mon repos (Ps 132,8)’. […]

Mais de même que le corps saint et pur, que le Verbe divin, par elle, avait uni à sa Personne, le troisième jour est ressuscité du tombeau, elle aussi devait être arrachée à la tombe, et la mère associée à son Fils. Et comme il était descendu vers elle, ainsi elle-même, objet de son amour, devait être transportée jusque ‘dans le tabernacle plus grand et plus parfait’… ‘jusqu'au ciel lui-même’ (He 9,11 ; 9,24).

Il fallait que celle qui avait donné asile au Verbe divin dans son sein, vînt habiter dans les tabernacles de son Fils, et comme le Seigneur avait dit qu'il devait être dans la demeure de son propre Père, il fallait que sa mère demeurât au palais de son Fils, ‘dans la maison du Seigneur, dans les parvis de la maison de notre Dieu (Ps 134,1; 135,2)’ Car si là est ‘la demeure de tous ceux qui sont dans la joie (Ps 87,7)’, où donc habiterait la cause de la joie ?

Il fallait que celle qui dans l'enfantement avait gardé intacte sa virginité, conservât son corps sans corruption, même après sa mort.

Il fallait que celle qui avait porté petit enfant son Créateur dans son sein, vécût dans les tabernacles divins.

Il fallait que l'épouse que le Père s'était choisie vînt habiter au ciel la demeure nuptiale.

II fallait que celle qui avait contemplé son Fils en Croix et reçu alors au coeur le glaive de douleur qui l'avait épargnée dans son enfantement, le contemplât assis auprès de son Père.

Il fallait que la Mère de Dieu entrât en possession des biens de son Fils, et fût honorée comme Mère et servante de Dieu par toute la création. L'héritage passe toujours des parents aux enfants ; ici cependant, pour emprunter l'expression d'un sage, les sources du fleuve sacré remontent vers leur origine. Car le Fils a soumis à sa mère la création tout entière » (St Jean Damascène, Homélie sur la Dormition 2, 10.14)

Chers auditeurs, la dormition et l’assomption de la Vierge Marie prépare la notre, à la fin des temps, non pas au retour du Christ, mais à la fin du temps de la Parousie, à la Fin du monde, quand ce sera l’assomption dans l’éternité. Remercions le Seigneur qui nous a préparé une telle gloire.

Évangile (Mc 10, 2-16)

« 2 Et les pharisiens s’approchèrent / en l’éprouvant
et en lui demandant / s’il est permis à un homme de répudier sa femme.

3 Il leur disait :
Qu’est-ce que Moïse / vous a commandé ?

4 Or eux, / ils disaient :
‘Moïse nous a permis / d’écrire une lettre de répudiation et de renvoyer.

5 Jésus répondit / et leur dit :
‘C’est en réponse à la dureté de votre cœur, / qu’il vous a écrit ce commandement.

6
Depuis le commencement, toutefois, / c’est mâle et femelle que Dieu les fit.

7
A cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, / et s’attachera à sa femme ;

8
et ils ne feront, eux deux, / qu’une chair unique.

Désormais, ils ne sont plus deux, / mais une chair unique.

9 Ce que Dieu, par conséquent, / a conjoint
que l’homme / ne le sépare pas !’

10
Et ses disciples l’interrogèrent de nouveau, à la maison, / sur ceci.

11 Et il leur dit :
‘Quiconque renverra sa femme et en prendra une autre, / est adultère.

12
Et si une femme renverra son mari  et sera à un autre, / elle est adultère.

13 Et ils lui amenèrent des enfants, / pour qu’il les rencontre.
Ses disciples, cependant, / rabrouaient ceux qui [les] leur amenaient.

14
Or Jésus le vit, / et fut contrarié.

Et il leur dit :

‘Laissez les enfants venir auprès de moi, / et ne les empêchez pas ;

car, en effet, c’est à ceux qui sont comme eux, / qu’est le Royaume de Dieu.

15 Amen, / je vous le dis :
Quiconque n’accueille pas le Royaume de Dieu comme un enfant, / n’y entrera pas !’

16 Et il les porta, / sur ses bras ;
et il imposa sa main sur eux, / et les bénit. »

 Alors que Jésus enseignait des foules nombreuses (Mt 10, 1), les pharisiens interrogent Jésus pour le mettre à l’épreuve. Moïse avait autorisé le divorce accompagné d’un billet de répudiation (Dt 24, 1-4) ; Malachie précisera que ce n’était qu’une concession, « car je hais la répudiation, dit le Seigneur le Dieu d’Israël » (Ml 2, 16). Jésus dit que Moïse avait permis de donner un acte de divorce, en raison de la dureté de votre cœur (Mc 10, 5) : en cas de mésentente, c’était un moindre mal, pour éviter… un meurtre.

Jésus considère que le remariage après le divorce est un adultère. Nous avons trois participes actifs : šāre, šāqel, gāar. Dans « quiconque répudie [šāre] » ou « prend [šāqel] », les actions isolées engagent un état qui dure, comme donc aussi le participe « est adultère [gāar] ». [6] Celui qui épouse une femme délaissée porte atteinte au mariage d’un autre en empêchant toute réconciliation du couple qui s’est séparé.

Cet enseignement du Christ a été reçu par l’Église primitive (1Co 7, 10-11), et transmis jusqu’à notre époque. C’est un appel qui se reçoit dans le souffle de l’Esprit Saint, l’Esprit de Jésus que l’apôtre Paul ne cesse d’invoquer dans toutes ses épîtres, dans toutes ses communautés.

Dans tous les cas, Jésus invite à un discernement en regardant « le cœur » et en regardant le dessein du « Créateur ». Jésus invite au discernement de la maturité humaine des impulsions, des différentes raisons du cœur, de leur signification. À l’origine, avant même l'union conjugale (Gn 4, 1), nous sommes appelés à être frères et sœurs en humanité, dans la réciprocité du don (Gn 1, 26-27 et Gn 2, 22-23). Le Créateur appelle à la spontanéité dans l’Esprit Saint qui est un esprit de don sincère de soi. Jésus invite à la maîtrise du désir charnel, par lequel le cœur humain a « une autre spontanéité dont l’homme charnel ne sait rien ou sait très peu de chose » [7]. Le don de soi s’exprime dans des situations concrètes, variées. Le ou la divorcé(e) n’a pas besoin de devenir un(e) religieux(se) pour vivre un célibat sanctifié dans le don. Il s’agit ici d’acte intérieur.

Après la tempête d’un divorce, la séparation avec quelqu’un avec qui « on a construit », avec qui « on s’est construit » laisse l’impression d’un champ de ruines. Il est positif de faire mémoire de ce qui a été bon et qui n’est pas détruit, de ce qui peut continuer de grandir après cette séparation. Il est légitime de méditer au fait que je ne me réduis pas à ce que je faisais avec l’autre, ni à ce que j’étais pour l’autre ; et il est utile de cultiver quelques amitiés, entrer en relation avec des voisins, des associations, etc.

La parole sur le divorce est adressée aux pharisiens pour les appeler à plus de sainteté, tandis que la parole sur les enfants est adressée aux disciples qui les rabrouent, c’est un appel à l’humilité, c’est aussi un appel à entendre les enfants.

Le Seigneur et l’Église primitive ont pensé et senti ce qui concerne le divorce en lien avec ce qui concerne les enfants.

Les enfants expriment d’une manière ou d’une autre l’importance de l’union de leur père et de leur mère, et donc le respect du mariage.

Les enfants ont été conçus dans l’unité de leurs parents. Un enfant perçoit que sa vie, sa personnalité, sa source, se situe dans l’unité des deux.

Le divorce ou l’annulation du mariage nécessite un soutien à l’enfant qui ne peut pas remplacer la source de son être par une sorte de vide. Dans l’ancienne discipline, quand l’enfant voyait que son parent remarié ne communie pas en mémoire du premier mariage qui l’a vu naître, cela pouvait être une source d’unité intérieure, il (elle) pouvait percevoir son parent absent honoré. Pour diverses raisons, la pastorale actuelle a assoupli la discipline. Quoiqu’il en soit, sachons entendre les enfants qui ont besoin de prendre conscience de leur histoire, en se disant par exemple : « J’ai été conçu de l’unité de mes parents, cependant aucun être humain ne peut fabriquer la vie et l’humanité : ma vie, mon être et mon humanité sont créées par Dieu, le Créateur. Mes parents se sont séparés et leur unité n’est plus visible, mais je continue à recevoir la vie du Créateur. »         

« Et ils lui amenèrent des enfants, pour qu’il les rencontre », avec le verbe qreb qui donne aussi le mot qurbānā, qui signifie rencontre ou offrande et qui est l’équivalent de l’Eucharistie ou des Saint Mystères, en Orient on ne dit pas « je vais communier », mais « je vais rencontrer ». Amenons, nous aussi les enfants à Jésus et à l’Eucharistie…

Et que Dieu vous bénisse tous.

 

[1] Cf. Jean-François FROGER, Le livre de la création, Editions les Grégoriennes, 2017, p. 327

[2] J-F. FROGER, Ibid., p. 403

[3] Cf. Tony Anatrella, Pastorale familiale, Doc 540. Etudes, mars 1991, 14 rue d’Assas 75006 Paris

[4] Marthe ROBIN, Journal, Ibid., p. 57 (12 janvier 1930)

[5] Marthe ROBIN, Journal, Ibid., p. 456 (25 mars 1932)

[6] La grammaire syriaque dit que « le participe actif exprime un fait qui dure, état permanent ou action répétée. Par extension, il exprime souvent aussi l’action isolée ou momentanée »  . Grammaire de Louis COSTAZ § 646

[7] Jean-Paul II, Audience générale du 12 novembre 1980

Date de dernière mise à jour : 09/09/2024